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Alchimie
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importante. Cette science était jusqu’alors inconnue en Occident (à l’exception
de quelques recettes, par exemple dans le noyau originel de la
Mappae clavicula
).
Le
Liber de compositione alchimiae
(Livre de la composition de l’alchimie)
, attribué
à Morien (le moine Maryânûs susmentionné) et traduit par Robert de Chester
en 1144, est souvent considéré comme le premier traité alchimique arabe traduit
intégralement. Ce texte rapporterait un des dialogues entre le moine Maryânûs et
le calife Khâlid ibn Yazîd, dont l’authenticité est très douteuse. En raison de l’im-
possibilité actuelle de dater bon nombre de traductions, cette traduction repré-
sente plus une date symbolique qu’une réelle limite historique ; certaines œuvres
pourraient avoir été traduites dans les années qui ont précédé. La seconde moitié
du xii
e
et une bonne partie du xiii
e
siècle voient les traductions de textes alchi-
miques se multiplier. Gérard de Crémone (1114‑1187), lui-même aurait écrit
trois traités d’alchimie : le
Liber divinitatis
(Livre de la divinité)
, traduction du
Kitâb al-lâhût
, premier traité du
Kitâb al-sab‘în
(Livre des LXX)
, œuvre fonda-
mentale du corpus jâbirien ; deux ouvrages faussement attribués à Râzî, dont le
célèbre
De aluminibus et salibus
, traité technique andalou qui aura une influence
considérable sur les premiers textes alchimiques latins. Parmi les autres ouvrages
attribués à Jâbir ibn Hayyân traduits en latin, il faut mentionner le
Liber mise-
ricordiae
(Livre de la miséricorde)
. Le
Sirr al-asrâr
(Secret des secrets)
d’al-Râzî
(authentique) est également traduit. Différentes œuvres attribuées à Avicenne
se lisent également en latin, dont l’
Epistola ad Hasen regem de re tecta
(Épître au
roi Hasen sur la chose cachée)
, traduction de la
Risâlat al-iksîr
(Épître sur l’élixir)
,
qui pourrait être authentique, et le
De anima
alchimique, pseudépigraphe dont
l’original andalou est perdu et qui a exercé une influence capitale jusqu’à la fin
du xiv
e
siècle. L’alchimie plus allégorique n’est pas en reste, et le
al-Mâ’ al-waraqî
wa-al-ard al-najmiyya
(L’Eau feuilletée et la Terre étoilée)
d’Ibn Umayl (Senior
Zadith en latin) est traduit sous le titre de
Tabula chemica
. Le
Mushaf al-jamâ‘a
,
traité anonyme contenant une discussion fictive entre différents alchimistes grecs
légendaires, est traduit et diffusé sous le célèbre nom de
Turba philosophorum
.
Parmi les théories transmises en Occident par les textes alchimiques arabes,
il faut mentionner avant tout la théorie du soufre et du mercure comme prin-
cipes des métaux, et la doctrine des élixirs. Les grandes questions des alchimistes
restent les mêmes. À cela s’ajoute un bon nombre de techniques. Une des diffi-
cultés que les traducteurs ont dû affronter est la place que la tradition orale occu-
pait dans l’alchimie arabe : la plupart des techniques et pratiques n’étaient pas
transmises par les écrits. De plus, le goût des symboles et des noms de code des
auteurs alchimiques a rendu ce travail encore plus complexe. Ainsi, les traducteurs
ont le plus souvent opté pour des méthodes très littérales. L’absence de connais-
sance et donc de lexique dans le domaine, dans le monde latin, a en outre poussé
les traducteurs à transcrire et non traduire certains mots, en particulier les termes