Échanges commerciaux
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et certaines communautés se spécialisent dans la commercialisation d’arte-
facts de prix comme la pourpre des Phéniciens, les laines de Milet ou la vais-
selle de luxe d’Athènes ou de Grande Grèce. Le marché, actif, est éclaté et les
premières tentatives de monopole n’apparaissent qu’à la fin du vi
e
siècle lorsque
les États prennent conscience des profits qu’ils peuvent tirer du contrôle des
échanges : en mer Tyrrhénienne, les Phocéens l’apprennent à leurs dépens dans
la bataille d’Alalia, au large de la Corse, vers 545, lorsqu’une coalition étrusco-carthaginoise les chasse des mers : exilés d’Asie Mineure où ils vivaient de la
pêche et de la piraterie, ils avaient cherché à poursuivre leurs pratiques dans un
monde déjà bien structuré par les réseaux des Grecs d’Occident, des Étrusques
et des Phénico-Puniques. Au v
e
siècle, ce sont les batailles navales de Cumes
entre Syracusains et Étrusques (474) ou Salamine entre Grecs et Perses (480),
officiellement présentées par les sources grecques comme des combats pour la
liberté, qui instaurent en réalité des réseaux prédominants. Il s’agit essentielle-
ment en Occident, de mettre fin à la piraterie, notamment étrusque, et de lut-
ter contre ce mode d’enrichissement, autrefois à l’honneur, comme le souligne
la gloire d’un Achille ou d’un Ulysse, mais tombé en disgrâce dans un monde
désormais ouvert aux conventions commerciales interétatiques. En mer Égée,
Athènes contrôle les échanges commerciaux par le biais de la ligue de Délos,
confédération s’appuyant sur une flotte militaire chargée d’assurer la sécurité des
routes maritimes. Athènes veut sécuriser son approvisionnement en ressources
indispensables à l’autarcie et à la défense de la cité, à savoir les céréales de la
mer Noire et de l’Égypte, le bois et les métaux ou les esclaves de Thrace. Elle
va jusqu’à installer des colonies militaires, les clérouquies, là où sa politique est
menacée. Elle s’équipe de structures qui font du Pirée le premier port de la mer
Égée et édicte des règles destinées à renforcer son monopole (imposition des
poids et mesures athéniens dans l’empire égéen, taxes sur toutes les marchan-
dises en transit dans les ports de la ligue, sur les produits importés et exportés
au Pirée, contrôle du commerce de céréales par l’interdiction pour des résidents
athéniens de transporter du blé ailleurs qu’à Athènes…). Elle met en place des
magistrats chargés de faire appliquer sa politique commerciale et des procédures
de justice qui défendent les intérêts de ses commerçants car le commerce mari-
time reste un métier autonome, partagé entre de multiples acteurs aux fonc-
tions et droits variés. Elle donne l’exemple à des cités qui organisent également
les modalités des échanges par l’attribution de privilèges et de garanties juri-
diques, se préoccupent de la répression des fraudes et d’un certain contrôle des
prix. La chute de la cité en 404, dans la guerre du Péloponnèse, bouleverse les
équilibres mais ne transforme pas fondamentalement les règles des échanges :
jusqu’à l’insertion de Rome dans le commerce maritime, la Méditerranée est
traversée de commerçants de plus en plus nombreux, qui se conforment aux