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Échanges commerciaux

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sur eux-mêmes, même s’ils échangent, le moment venu, bateaux, marchandises,

hommes et croyances », à laquelle est venu récemment s’opposer l’ouvrage de

Peregrine Horden et Nicholas Purcell (2000), défendant l’idée d’une unité et

d’une continuité de la Méditerranée, par le biais de la « connectivité » entre les

uns et les autres, particulièrement nette dans le domaine des échanges commer-

ciaux. Aussi s’intéresse-t‑on davantage aujourd’hui aux produits, circuits, acteurs

et modalités de ces échanges à travers une documentation essentiellement épi-

graphique et archéologique lorsque la littérature antique insistait sur les dangers

des déplacements maritimes, les risques du commerce au long cours et mini-

misait le rôle des trafics maritimes et de leurs profits. L’historiographie dissocie

également les échanges de proximité, terrestres ou maritimes, qui privilégient

pratique du cabotage et commerce réduit de redistribution ou de transit autour

de comptoirs portuaires, et le grand commerce maritime, ou commercede gros,

qui implique des investissements importants, en termes à la fois de capitaux, de

mobilisation humaine et de sécurité militaire. Les premiers ont existé durant

toute l’Antiquité, par le biais de barques à la technique plus ou moins élaborée,

et se pratiquaient à l’intérieur d’espaces délimités, qualifiés de « mers » par les

Anciens eux-mêmes, et qui cloisonnaient les mobilités. Le second s’est progres-

sivement développé pour faire de la Méditerranée un espace unifié.

Dès le viii

e

siècle av. J.‑C., les États qui ont accès à la mer en tirent rapide-

ment un grand profit, telles les cités phéniciennes de Tyr ou de Sidon, ou les

cités grecques de Corinthe, Égine, Mégare ou Milet, qui profitent de l’ouver-

ture des routes maritimes pour fonder des cités sur lesquelles elles s’appuient afin

d’organiser leur approvisionnement et exporter leur production. Milet aurait

ainsi créé quelque cent cités en mer Noire, tandis que Corinthe ou l’Eubée orga-

nisent des réseaux autour de lieux-charnières de la Méditerranée. La première,

à la recherche du bois et des métaux de l’Illyrie, fonde Corcyre sur l’île de Corfou,

s’installe en Adriatique par le biais d’établissements secondaires, Apollonia et

Épidamne, et fonde, au bout de la chaîne, Syracuse, qui lui ouvre la Sicile fer-

tile. Chalcis et Érétrie s’intéressent à la route du fer étrusque et égrènent leur

route d’escales de peuplement qui contrôlent pour elles le détroit de Messine, le

golfe de Naples et la mer Tyrrhénienne. Les Phocéens, à la recherche du cuivre

et de l’étain de Cornouailles et de Gaule, fondent Massalia et poursuivent vers

l’Ibérie où ils entrent en contact avec les Phéniciens et le royaume de Tartessos,

l’Andalousie riche en or et en argent. Les métaux, dont on connaît mal les lieux

d’extraction égéens, mais aussi les céréales, toujours insuffisantes au regard de

l’irrégularité de la production, font partie des cargaisons, tout comme les esclaves

ou les mercenaires dont les zones colonisées sont les principaux fournisseurs.

Certaines régions offrent en outre des produits spécifiques, comme l’huile de

Corinthe, le cuivre de Chypre, le bitume d’Illyrie ou l’alun des îles Éoliennes ;