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Navigation

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périlleuse. Très tôt, les marins de l’Antiquité surent en tirer les conséquences en

distinguant une belle saison, où la mer est ouverte à la navigation, d’une mau-

vaise où la mer est fermée aux activités maritimes. Dès le viii

e

siècle av. J.‑C.,

Hésiode (

Les Travaux et les Jours

, 618‑630, 663‑684) recommande de ne pas

naviguer l’hiver, déconseille les navigations de printemps et d’automne trop

aléatoires et préconise d’attendre la belle saison au cœur de l’été. Les Romains

reprendront cette distinction. Mais dans la pratique, la durée de

mare clausum

,

où la mer est fermée à la navigation, est variable selon que l’on y inclut, ou non,

le printemps et l’automne : à une conception courte de

mare clausum

, de la mi-novembre au début mars, s’oppose ainsi une conception longue qui s’étend de

la mi-septembre à la fin mai. Pour autant, il ne s’agit en aucun cas d’une inter-

diction formelle mais d’une pratique fondée sur l’expérience, qui, selon les cir-

constances, pouvait être transgressée à ses risques et périls.

Tirant profit de ces conditions favorables, le système de navigation antique

repose avant tout sur des temps de navigation fractionnés où la navigation côtière

est entrecoupée de traversées plus ou moins longues loin des côtes. Au-delà du

simple cabotage côtier, tout voyage maritime comporte au moins trois temps :

une navigation côtière depuis le port de départ jusqu’à un point remarquable

de la côte (amer) ; une traversée en haute mer depuis ce point remar-

quable jusqu’à un autre point remarquable ; enfin, le parcours s’achève par une

nouvelle navigation côtière permettant de rejoindre la destination finale. Au

besoin, ce schéma est reproduit plusieurs fois selon l’éloignement des ports de

départ et d’arrivée. Mais en l’absence de cartes et d’instruments de navigation,

qui n’existaient pas dans l’Antiquité, la navigation antique est un art qui repose

sur une profonde connaissance des côtes, des vents et des astres.

Dans un système où prédomine la navigation côtière, il convient de connaître

non seulement les ports avec leurs conditions d’accès, leur exposition et leur éloigne-

ment, ou encore les lieux de ravitaillement et d’abri, mais aussi les dangers consti-

tués par les côtes inhospitalières, les caps, les écueils, les hauts fonds et les violents

courants. Les côtes plates et sableuses des rivages des Syrtes ou les côtes rocheuses

et accores de l’Eubée étaient ainsi particulièrement redoutées, comme le passage

de certains caps rendu périlleux par les sautes de vent et l’agitation perpétuelle de

la mer à l’exemple du cap Malée, au sud du Péloponnèse, ou du cap Chélidonia

sur la côte d’Asie Mineure. Tout aussi importante est la connaissance des points

remarquables, jalonnant les côtes, qui permettent de se repérer et indiquent les

directions à prendre. Ces points, ou amers, sont le plus souvent constitués d’élé-

ments naturels, caps, montagnes ou reliefs remarquables, mais peuvent aussi être

implantés par l’homme. C’est le cas de nombreux sanctuaires marins situés sur des

promontoires comme le temple d’Apollon au cap Sounion, à la pointe de l’Attique,

ou encore du plus célèbre d’entre eux, le phare d’Alexandrie, implanté sur une