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Navigation

1083

soudes végétales) le long des côtes espagnoles, pour approvisionner les savonne-

ries marseillaises, a orienté ce liseré littoral, entre Alicante et Valence, vers une

agriculture spéculative d’exportation. Le transport du vin par caboteurs « vinai-

tiers » n’est pas étranger à la conquête d’espaces littoraux par des vignobles tour-

nés vers la commercialisation.

Cette navigation ne saurait pourtant être considérée seulement en termes

de concurrence avec les autres moyens de circulation. Elle s’intègre souvent,

à l’échelle locale, nationale ou internationale, dans un ensemble complexe

d’échanges et constitue le segment maritime d’un transport plurimodal. Le tra-

fic des bois – qui combine les charrois pour atteindre la voie fluviale, le flot-

tage et, à partir d’une rupture de charge, le cabotage à destination des centres de

consommation – offre un tel modèle de combinaisons dans lesquelles la navi-

gation constitue un maillon dans la chaîne logistique des transports en Médi­

terranée, avant que n’interviennent les mutations du milieu du xix

e

siècle qui

ont bouleversé les conditions de l’« économie de la circulation ».

La propulsion du navire à l’aide d’une machine à vapeur, comme expéri-

menté en Manche et à travers l’océan Atlantique dès le début du xix

e

siècle,

modifie également la navigation en Méditerranée. Lancé en septembre 1818

à Castellamare, le

Ferdinando I

er

est le premier navire de commerce à vapeur

de Méditerranée, reliant Naples à Marseille par Livourne et Gênes. Ce sont les

navires de guerre, encore équipés de mâts et de voiles pour pallier les avaries des

machines et économiser le charbon, qui sont souvent les premiers pourvus d’in-

novations ; ainsi en est-il de l’aviso le

Sphinx

, navire militaire à vapeur capable de

naviguer en haute mer, qui arrive à Toulon en 1828. En 1832, une ligne régu-

lière est mise en service entre Marseille et Alger ; en 1836, une autre est établie

entre Marseille et Gibraltar qui devient un important dépôt de charbon pour

ravitailler les « vapeurs » en escale. Au milieu du xix

e

siècle, les grands clippers

n’ont certes pas totalement déserté la mer Intérieure mais de nouvelles tech-

niques annoncent déjà le déclin de la voile. Les roues à aubes sont abandonnées

au profit de la propulsion par hélice dont un des inventeurs, John Barnes, fil-

leul de James Watt et constructeur du premier vapeur français à hélice au Havre

(le

Napoléon

, 1843), termine sa carrière dans les chantiers navals de La Ciotat

entre 1844 et 1852. Par ailleurs, la construction métallique modifie le dessin et

la structure des navires en apportant solidité, étanchéité de la carène et possibilité

de compartimentage. D’autres améliorations (chaudière tubulaire, alimentation

à l’eau douce, machine à plusieurs cylindres, énergie électrique) accroissent à la

veille du xx

e

siècle les puissances, vitesses et dimensions des bâtiments tout en

favorisant la régularité des déplacements. Les armateurs – ici les Fraissinet, là les

Fabre – ainsi que de grandes compagnies de navigation comme les Messageries

maritimes, acquis au nouveau mode de propulsion, créent des lignes régulières