Sel | Hocquet, Jean-Claude

Sel 1378 la production en quelques lieux privilégiés. La cité n’a pas hésité à s’emparer de salines étrangères pour en restreindre la production, ainsi à Cervia en Romagne, dans un territoire sujet du pape, ce qui suscita à son encontre une hostilité tenace et l’entraîna dans des guerres coûteuses largement financées par l’augmentation de l’impôt du sel. Le haut prix du sel taxé soulevait quelquefois les populations qui se révoltaient et entamaient des guerres du sel contre le pouvoir, par exemple en Piémont au xvii e siècle. En France, limitrophe des terres d’Empire sur la rive gauche des fleuves Saône et Rhône, la production de sel était abondante en Languedoc comme en Provence, dans les étangs littoraux. Le roi de France acheta, à la fin du xiii e siècle, Peccais au comte d’Uzès et fit construire la forteresse d’Aigues-Mortes, tandis que Charles d’Anjou, roi de Sicile, avait établi un monopole de vente du sel des salins de son comté de Provence. Les deux souverains aboutirent à un accord sur la vente de leur sel : le roi de France vendrait le sien aux pays de la rive droite et partage- rait avec le comte de Provence ceux de la rive gauche. En vertu de cet accord, le sel de Peccais parvenait en Suisse dans le canton de Vaud, tandis que le comte de Savoie cherchait à échapper au monopole de son voisin de Provence en déve- loppant l’importation du sel d’Eivissa dans son port de Nice d’où il était diffusé dans ses États alpins et en Piémont. Le sel était un article primordial du commerce (et de la fiscalité). Outre la saveur qu’il confère aux aliments les plus insipides et qui excite l’appétit, il fut jusqu’à l’invention du froid industriel, qui suivit la découverte et l’exploitation de l’électricité, le principal agent de longue conservation grâce à sa capacité de déshydratation. Son pouvoir de conservation ne concernait pas seulement la viande et le poisson. Sans le sel, il serait impossible de fabriquer les fromages, le cuir, l’huile (on commençait par conserver les olives dans le sel avant de les envoyer au pressoir). Mais il avait bien d’autres usages, dans le raffinage des métaux précieux, la transformation du minerai de fer en acier, ou dans la pote- rie où il produisait une glaçure sur les vernis. Le bétail domestique est également consommateur de sel : les brebis, chèvres et vaches laitières en ont, comme les humains, un besoin journalier. C’est ce caractère quotidien permanent et uni- versel qui justifie les volumes importants de la consommation et par conséquent de la production, du transport et du stockage. Le sel était emmagasiné dans des entrepôts situés dans les ports d’importation. Mais, pour prévenir toute rupture dans le transit des sels, on aménageait aussi des entrepôts à proximité des salins puis dans les ports fluviaux ou au pied des cols de montagne (Alpes) afin de toujours disposer sur place de quoi répondre aux besoins. Contrôler ces points de passage facilitait aussi la tâche du monopole qui, souvent, se bornait à préle- ver un péage au passage des convois de barques ou des caravanes de mulets qui acheminaient le précieux produit.

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