Médias | El Oifi, Mohammed; Gebeil, Sophie

Médias 901 française. À partir de 1934, le gouvernement italien, à travers la radio en arabe Bari (Williams, 2006 ; Grange, 1976), suivi par le régime de l’Allemagne nazie (Herf, 2009), ont construit et diffusé un discours médiatique (radiophonique) dont le principal objectif est de modifier le rapport de force en Méditerranée. Durant la première moitié du xx e siècle, les enjeux politiques des médias en Méditerranée étaient en grande partie liés aux rivalités entre les nations euro- péennes et à la question de la décolonisation dans un contexte international mar- qué par la guerre froide. Après les indépendances, les États de la rive sud de la Méditerranée se sont dotés de leurs propres médias nationaux, dont la mission ne se limite pas à l’information (Ferro, 2006). Ils sont également utilisés pour consolider une identité nationale fragile et mobiliser la société autour du pro- jet modernisateur de l’État. Les médias sont également le moyen de redéfinir les rapports que les sociétés, nouvellement indépendantes et dépourvues de tra- dition diplomatique, doivent entretenir avec le reste du monde. La logique de l’alignement sur le bloc occidental ou soviétique ou, au contraire, du choix du non-alignement conformément aux clivages structurants de la scène internatio- nale dans les années 1960, est notamment perceptible sur les écrans télévisuels. La Méditerranée en tant que « concept » plutôt qu’entité naturelle et géogra- phique intangible est donc également construite par des flux de communication transnationaux qui résistent d’autant plus à la territorialisation que les médias ignorent les frontières sauf peut-être celles des langues. En outre, la multiplica- tion des chaînes d’information en continu multilingue (arabe, anglais, français notamment) participe au décloisonnement des champs médiatiques nationaux et favorise leur interpénétration. Cette complexité, cette richesse ne favorisent guère une description simplifiée et opérationnelle des contours du « champ médiatique méditerranéen » qui est le plus souvent perçu comme une « entité en devenir ». La difficulté d’articuler médias et politique jette des doutes sur la pos- sibilité d’une véritable régulation des relations intra-Méditerranée par les médias. Vers un espace audiovisuel partagé ? Après la chute du mur de Berlin et la fin de la bipolarité Est/Ouest, les tensions en Méditerranée ont persisté. Sur le modèle de l’Union européenne, les efforts se sont intensifiés pour la construction d’une identité politique méditerranéenne, à travers la création du Partenariat euro-méditerranéen ( pem ) lors de la confé- rence de Barcelone en 1995. L’idée d’une régulation des relations méditerra- néennes par les médias, sans constituer une nouveauté, est l’un des objectifs du volet culturel du pem . Elle se manifeste notamment par la création, en 1999, de la Conférence permanente de l’audiovisuel méditerranéen ( copeam ), qui

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