Construction navale | Pomey, Patrice

Construction navale 285 À côté des galères marchandes à propulsion mixte (voiles et rames), le navire de commerce est un véritable voilier à la coque arrondie et puissante dont les formes très variables, et parfois très évoluées, reflètent la diversité des types et de leurs régions d’origine. Le gréement est à un, deux ou trois mâts, et le mât de proue se caractérise par sa position inclinée sur l’avant. Chaque mât porte une voile carrée (c’est-à-dire perpendiculaire à l’axe du navire) que des cargues permettent de réduire ou d’en modifier la géométrie. Ce système d’une grande souplesse d’utilisation compensait l’absence de superposition des voiles. Si la voile carrée est le gréement type du navire antique, il existait aussi des gréements axiaux, comme la voile à livarde (perche diagonale) en usage dès le ii e siècle av. J.‑C. et la voile latine triangulaire qui n’apparaît que vers la fin de l’Antiquité. Deux gouvernails latéraux situés de chaque côté de la poupe permettent de diriger les navires. De type compensé, le gouvernail antique, contrairement à une opinion trop généralement admise, était particulièrement sensible et efficace, mais rela- tivement fragile en raison de sa position. L’adoption de la construction à tenons et mortaises permet de développer le tonnage des navires, qui n’échapperont pas au gigantisme de l’époque hellénis- tique. Au iii e siècle av. J.‑C., la Syracusia , construite par Hiéron II de Syracuse avec le concours d’Archimède, atteindra 3 000 à 4 000 tonneaux de port en lourd, mais restera un exploit technique sans lendemain. À l’époque romaine, les grands navires de commerce atteignent 500 à 1 000 tonneaux de charge, voire plus pour certains navires exceptionnels. Vers la fin de l’Antiquité et le début de l’époque byzantine, entre les v e et viii e siècles de notre ère, se produit un profond changement dans l’architecture navale méditerranéenne. Le principe de construction sur bordé est abandonné au profit du principe de construction sur membrure, dit encore « sur squelette ». Dans ce nouveau système de construction, la membrure est d’abord assemblée sur la quille pour constituer l’ossature de la coque qui est ensuite revêtue des planches du bordé, toujours à franc-bord. Les formes de la carène sont dès lors déterminées par les sections transversales de la membrure. Le squelette, soli- dement assemblé dans toutes ses parties, devient la structure principale alors que les planches du bordé sont simplement clouées sur les membrures. Après une longue période de transition où l’on voit se côtoyer les deux systèmes de construction et des constructions mixtes faisant appel aux deux principes sur bordé et sur membrure, la construction sur squelette s’imposera à partir du xi e siècle jusqu’à nos jours. En l’absence de référence à un plan, ce nouveau sys- tème de construction reste empirique et fait appel à des systèmes de déduction permettant de tracer les membrures à partir de la principale section ou maître-­ couple. Ce n’est qu’à partir du xviii e siècle que se généralisera dans les arsenaux d’État le recours aux plans, complétés, à partir du milieu du siècle, par des

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