Colonisation | Sèbe, Berny

Colonisation 266 Avant que le terme d’origine latine ne naisse, de premières « colonies » appa- rurent dès l’Antiquité, œuvres de Phéniciens et de Grecs qui contribuèrent de manière déterminante à l’essor de villes destinées à jouer un rôle prépondérant dans l’aire méditerranéenne, à l’instar de Marseille, colonie ionienne. L’activité commerciale des Phéniciens en Méditerranée permit vraisemblablement l’éta- blissement de colonies en Sardaigne dès le ix e siècle av. J.‑C. et dans le Sud de l’Espagne et en Sicile dès la fin du viii e siècle. Des Tyriens donnèrent naissance à Carthage dès la fin du ix e siècle ; celle-ci deviendra à son tour une puissance coloniale en Méditerranée occidentale et il sera dès lors difficile de distinguer le phénomène de colonisation phénicienne de son équivalent punique. L’expansion des populations, valeurs et croyances phéniciennes de l’est vers l’ouest de la Méditerranée entra rapidement en concurrence avec un mouvement similaire en provenance de Grèce, où de puissantes cités, confrontées au surpeuplement, dont les effets furent probablement accentués par un manque de terres agri- coles productives et quelquefois par des querelles politiques, voient certains de leurs habitants s’expatrier sur le pourtour méditerranéen. Les Grecs commen- cèrent à s’établir en Asie Mineure, dès le xi e siècle av. J.‑C., mais c’est entre le viii e et le vi e siècle que le phénomène s’étendit, alimenté par la quête de terres arables, de nouvelles perspectives commerciales ou les rivalités politiques qui contraignent les perdants à choisir l’exil plutôt que l’humiliation. La croissance des établissements grecs autour de la Méditerranée amena Socrate à les décrire comme « des fourmis et des grenouilles autour d’une mare » (Platon, Phédon ). Polysémique, le concept grec d’ apoikia ne correspondait qu’en partie à celui de « colonie » au sens contemporain, mais il renvoyait déjà à deux aspects fonda- mentaux de la colonisation, qui ont perduré jusqu’à nos jours : la migration d’un groupe de personnes en vue du développement d’une nouvelle implanta- tion ; la fondation proprement dite d’un nouvel établissement qui entretenait des liens culturels et commerciaux avec sa « cité-mère » (métropole). Le phé- nomène s’étendit ensuite au-delà du bassin méditerranéen (jusqu’en Asie) sous Alexandre le Grand (336‑323 av. J.‑C.). De tels processus d’expansion phénotypique, culturelle et politique s’accélé- rèrent avec l’extension du pouvoir romain, qui chercha à consolider la Pax romana en installant des noyaux de population romaine dans les territoires nouvelle- ment conquis : par métissage ou subjugation, les citoyens ou les soldats permet- taient un enracinement culturel et économique profond et durable, dont l’effet était démultiplié par les mariages avec des femmes locales. L’installation de vétérans sur les terres conquises visait non seulement à récompenser la fidélité du combattant romain, mais aussi à stabiliser la région nouvellement soumise et à la protéger d’éventuelles incursions ennemies. Progressivement, ce réseau fortement interconnecté grâce à la maîtrise des moyens de navigation

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