Bains | Buitelaar, Marjo

Bains 142 qui pouvaient asseoir leur position et leur pouvoir, tout en flattant leurs subor- donnés (Zajac, 1999, p. 99‑105). Dans la culture judaïque classique, la purification par immersion totale dans des bains rituels (mikvés) était plus une pratique religieuse qu’un événement social. Pourtant, les dirigeants sous le règne d’Hérode ont adopté la culture romaine des bains dans leurs palais. À Massada, Jéricho, ainsi que dans les demeures de l’élite de Jérusalem, on pouvait trouver des bains à la romaine pourvus de mikvés . La position du premier christianisme par rapport aux bains publics était ambiguë. Se baigner pour le plaisir allait clairement à l’encontre de la notion chrétienne de spiritualité qui commandait une négation du corps et des sens. En revanche, le bain sous sa forme fonctionnelle, hygiénique et thérapeutique était accepté et les bains ont gardé leur place dans les palais impériaux et épiscopaux jusqu’à la fin de l’Empire byzantin. Au cours de l’histoire, cependant, prendre de la dis- tance par rapport à la culture du bain a été un élément essentiel des politiques identitaires chrétiennes pour pouvoir distinguer les chrétiens des païens, et plus tard des musulmans. Selon la doctrine islamique, les ablutions rituelles étant obligatoires, la culture du bain a été largement adoptée par les premiers conquérants musulmans de Syrie, d’Égypte et de Mésopotamie. Ils ont rapidement construit leurs propres hammams, ou « bains publics », ce qui fut le début d’une très longue pratique, principalement urbaine et typique du Moyen-Orient. La majorité des usagers des hammams étaient des musulmans mais, souvent, les juifs et les chrétiens les utilisaient aussi, même si tous les hammams n’autorisaient pas forcément la mixité religieuse (Grotzfeld, 1970). Chérir le corps et améliorer sa beauté grâce aux bains correspond aux tradi- tions exégétiques dominantes selon lesquelles l’islam permet le plaisir sensuel et désapprouve l’ascèse (Bouhdiba, 1975). Il existe un lien fort entre hammam et sexualité (Messina, 1991). Cela s’explique en partie par le fait qu’une ablu- tion rituelle est nécessaire après un rapport sexuel, donc se rendre aux bains publics était la tradition non seulement avant mais également après une relation sexuelle. Une autre explication concerne la quasi-nudité des utilisateurs des bains. L’acceptabilité des bains collectifs a toujours été un sujet controversé parmi les docteurs de la loi islamique. Bien que la stricte ségrégation des sexes soit la règle, certaines inquiétudes surgissent au sujet de la nudité et des tentations homo- sexuelles qu’elle peut potentiellement engendrer. Après avoir débattu longue- ment des pour et des contre, le célèbre al-Ghazâlî (mort en 1111) est arrivé à la conclusion que l’inspiration est plus importante que la transpiration : la chaleur du hammam doit rappeler à chacun les feux de l’enfer. Le hammam a longtemps joué un rôle dans différents rites de passage. Traditionnellement, les cérémonies de mariage sont précédées d’une visite (séparée)

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