Présides | Martin Corrales, Eloy

Présides 1314 Toutefois, les places ne disposaient pas de ports à proprement parler et à peine d’une flotte nécessaire pour garantir le maintien des communications vitales avec la péninsule Ibérique ; pour ces raisons, leurs populations ont souffert de priva- tions de tout genre, alimentaires avant tout. Malgré le climat de guerre, les monarques espagnols et sultans maghré- bins conclurent, plusieurs fois, des trêves ou modérèrent leurs affrontements. Ainsi, et contrairement à ce qui est généralement admis, les échanges commer- ciaux entre les presidios et les populations de leur hinterland ont constitué un élément persistant malgré une certaine irrégularité. Les Marocains introdui- saient à Ceuta et Melilla des têtes de bétail, du blé, de la cire et du cuir, d’autres denrées alimentaires et matières premières ; comme cela était couramment le cas dans les relations entre l’Espagne et le Nord de l’Afrique de l’époque, ils étaient payés en monnaie d’argent. Ce ne sont pas là les seuls échanges. Bon nombre de morisques d’Espagne expulsés vers le Nord de l’Afrique passèrent par Ceuta et Melilla. Il en fut de même pour les musulmans réduits en escla- vage par les chrétiens et qui remontaient vers le nord ; les chrétiens asservis par les musulmans, quant à eux, transitaient dans la direction opposée. Cette affluence comprenait aussi, logiquement, les rédempteurs des captifs, les chré- tiens renégats et les musulmans convertis au christianisme – ces derniers, dans une moindre mesure. Au cours des siècles, de nombreux Marocains ou musulmans qui fuyaient leur pays trouvèrent refuge dans les enceintes de Ceuta et de Melilla. Les familles algériennes alliées des Espagnols à Oran furent déplacées à Ceuta à la fin du xviii e siècle. L’émir Abd-el-Kader lui-même, chef de la résistance algérienne contre les Français, demanda, au milieu du xix e siècle, la protection des auto- rités de Melilla. De nombreux soldats des garnisons militaires des deux places, ainsi que des condamnés qui purgeaient leur peine, désertèrent ou fuirent pour gagner le territoire marocain en quête d’une vie meilleure. Beaucoup d’entre eux furent capturés par les autorités marocaines et livrés à celles de Ceuta et Melilla en échange d’une somme convenue. De nombreux autres devinrent renégats et/ou s’enrôlèrent dans l’armée du sultan puis s’installèrent définitivement au Maroc. Les sultans et les autorités frontalières sollicitèrent des médecins et autres professionnels vivant dans les enclaves afin de bénéficier de leurs connaissances et de leur expérience. Jusqu’à une date bien avancée du xviii e siècle, certaines familles juives furent autorisées à y résider. Par la suite, il fut permis à d’autres juifs de s’y rendre pour assurer leur rôle traditionnel d’intermédiaire entre chré- tiens et musulmans. En 1767, un traité de paix, d’amitié et de commerce fut signé entre l’Espagne et le Maroc. Toutefois il ne mit pas fin aux tensions aux frontières, ni aux conflits ouverts tels que les épisodes de guerre de 1774‑1775 et 1791‑1792, ni

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