Pouillon, Fernand | Bonillo, Jean-Lucien

Pouillon, Fernand 1302 aux avant-gardes modernes sans renoncement pour autant à l’idée d’invention, comprise dès lors comme relecture et actualisation de la tradition savante héri- tée de la discipline. Ce grand legs, dont il apprécie la version donnée par Auguste Choisy (1841‑1909) d’une lente et métissée évolution des formes architecturales, Fernand Pouillon prendra soin de le compléter à l’aube de sa carrière, qui débute en Provence, par une connaissance de la tradition locale. Il le fait en prenant une part active à la construction d’une culture sur le patrimoine architectural et urbain provençal. Dès l’immédiat après-guerre – peut-être en écho aux relevés d’architecture rurale des régions de France, réalisés durant la Seconde Guerre mondiale à l’initiative de Georges-Henri Rivière –, Fernand Pouillon entreprend successivement le relevé (fait par ses élèves/collaborateurs) et la publication des principaux hôtels, monuments et ordonnances urbaines d’Aix-en-Provence. Ils seront bientôt suivis par ceux du village ruiné des Baux-de-Provence et des trois abbayes cisterciennes : Le Thoronet, Sénanque, Silvacane. Cette contribu- tion culturelle majeure à la discipline architecturale témoigne aussi du souci que l’architecte avait d’inscrire son travail et son œuvre dans un territoire, entrevu dans toute sa profondeur historique et ses particularités géographiques. Travaillée aussi par les questions identitaires, à l’instar de la jeune génération critique du mouvement moderne (le Team Ten ), sa production de maître d’œuvre va décli- ner cette inscription locale sur différents registres, oscillant entre contextualisme et référence identitaire à la tradition. La reconstruction du village des Sablettes dans le Var (1950‑1953) témoigne de la possibilité de décliner le néo-provençal sans pittoresque excessif, avec des masses ordonnées et contenues et sans renoncer à un langage décoratif fleuri. La démonstration vaut surtout pour les exceptionnelles qualités d’urbanité de ses espaces publics. L’architecte avait rangé cette création dans le « genre facile ». L’ensemble dit des « 200 logements » à Aix-en-Provence (1950), appelé désormais « résidence Fernand-Pouillon » par la volonté des habitants, relève d’une figure plus proche, semble-t‑il, des expériences néoréalistes italiennes qui lui sont contemporaines. L’enjeu est moins le souci du décor que la disposi- tion des volumes dans une logique d’unité/diversité propre à évoquer la totalité chorale d’une communauté d’habitants. Les référents – très loin de la logique haussmannienne de la « rue corridor » – sont les places aristocratiques du vieil Aix-en-Provence et le paysage du quartier Mazarin. L’introduction de l’ouvrage Ordonnances avait révélé l’intérêt de l’architecte pour ce fragment des xvii e et xviii e siècles aux tracés rigoureux et au paysage urbain avenant.

RkJQdWJsaXNoZXIy NDM3MTc=