Pitt-Rivers, Julian | Handman, Marie-Élisabeth

Pitt-Rivers, Julian 1239 Grazalema, auquel il attribuera le pseudonyme d’Alcalá de la Sierra dans la pre- mière édition de son livre The People of the Sierra (1954). Malgré une flatteuse préface d’Edward E. Evans-Pritchard, le livre sera refusé par Clarendon Press au motif que l’anthropologie ne pouvait porter que sur des populations primitives. C’est d’ailleurs avec un bagage africaniste que Pitt-Rivers se rendit en Andalousie où il fut bien embarrassé de ne trouver ni lignages ni groupes d’âge, et obligé, comme il le dit dans sa préface à la seconde édition (1971, p. xv), de penser les choses par lui-même. Son livre, finalement édité par Weidenfeld, fut très bien reçu aux États-Unis et lui valut d’être invité par George Foster (qu’il avait connu en Espagne) et Robert Redfield à aller enseigner à Berkeley d’abord, puis à Chicago en tant que Visiting Professor . Invitation qu’il accepta mais qui interrompit un terrain qu’il venait de commencer dans le Quercy et qui ne donnera lieu qu’à un seul article. Cependant, il profitera de ses liens avec Foster pour faire du terrain au Mexique, au Chiapas principalement, dont sortiront divers articles, tels « Thomas Gage parmi les Naguales » ( L’Homme , XI, 1, 1971, p. 5‑31), occasion pour lui de comparer la sorcellerie maya avec la sorcellerie européenne du xvi e siècle et de mettre en garde les anthropologues contre le désir de retrouver intactes des croyances anciennes dans des populations pourtant acculturées par la colonisation et dont les croyances actuelles ne peuvent être que métissées. Il démontre que ce désir conduit, mais de manière inversée, à la même incompré- hension des cultures que l’assimilation dans la pensée de Gage, missionnaire du xvii e siècle, des croyances des Indiens à des entreprises du diable (des chrétiens). Son souci de la prise en compte des tours et détours de l’histoire dans l’analyse anthropologique sera permanent tout au long de son œuvre. À relire son travail sur Grazalema près de soixante ans après sa première paru- tion, on est saisi d’y trouver en germe tout ce qui allait faire l’objet de ses préoc- cupations ultérieures et les thèmes qu’il n’allait cesser de creuser, à l’exception d’une analyse approfondie de l’anarchisme, mouvement qu’il évoque cependant à plusieurs reprises : les rapports du local au national, les classes sociales et les représentations de l’égalité entre citoyens, la parenté réelle ou fictive et la famille, l’hospitalité, la grâce, les rituels et en particulier la tauromachie, enfin et surtout la différence des sexes et les valeurs de la société, en particulier l’honneur et la honte. L’ensemble de ces items doit, dans son esprit, être étudié dans leur arti- culation et à la lumière de l’histoire pour pouvoir saisir ce qui constitue la struc- ture sociale d’un village ou d’une petite ville, définition de la structure sociale qui diffère, par conséquent, de celles qu’en donnent économistes et sociologues. À Chicago, il enseigna l’anthropologie de la Méditerranée et proposa à Sol Tax, alors doyen de la faculté d’anthropologie, d’organiser un colloque interdisciplinaire sur cette région du monde. Sol Tax accepta, invita pour un semestre John Peristiany qui fut bientôt rejoint par Julio Caro Baroja, historien

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