Photographie | Mégnin, Michel

Photographie 1231 À partir de 1845, le calotype supplante peu à peu le daguerréotype. Inventé par l’Anglais Talbot, il permet d’obtenir enfin plusieurs positifs à partir d’un négatif papier. Son velouté se révèle particulièrement adapté aux lumières et ombres fortes de la Méditerranée. En 1846, George Wilson Bridges importe le calotype en Italie où se crée bientôt une école de Rome. En France, la mission héliographique envoyée par la Commission des monuments historiques donne le ton à une tradition documentaire sur l’architecture. Amateurs ou missionnés par les ministères, les calotypistes de l’école française rayonnent sur le bassin médi­ terranéen : Maxime Du Camp, Auguste Salzmann, Louis Vignes, John B. Greene, Louis de Clercq, Félix Teynard… Parallèlement à ces voyages, la pratique locale reste moins documentée mais elle se développe et gagne tant la capitale de la récente conquête française en Algérie (Delemotte, Alary) que celle de l’Empire ottoman où, en 1846, un sieur Compas dit former 97 élèves à Constantinople. Même si l’espace photographique reprend l’itinéraire du Grand Tour et s’étend au Maghreb au rythme de l’influence internationale et de la colonisation, le photographe n’avance donc pas toujours dans les pas du soldat. L’ère des grands studios Après 1850, l’utilisation du collodion sur une plaque de verre permet une meil- leure précision de l’image et la multiplication des formats qu’Eugène Disdéri réduit à la photo-carte de visite. La photographie entre définitivement dans l’ère industrielle. Parmi les photographes-voyageurs, Francis Frith rapporte d’Égypte et de Palestine de quoi créer une véritable entreprise (1856). Les studios résidents se multiplient sur un marché fidèle à la veduta et à la répétition du pittoresque : Alinari (Florence), Naya (Venise), Sommer (Naples), Laurent (Espagne), Alary-­ Geiser et Portier (Alger), Hammerschmidt, Béchard et Lekégian (Le Caire), Robertson, Abdullah et Sebah (Constantinople), Bonfils (Beyrouth). Si les pion- niers ont diffusé l’image immobile d’un passé en ruines appelant au secours la science et la civilisation européenne, s’intéressant parfois à l’architecture arabe, ces ateliers proposent un catalogue où les clients choisissent les images d’une altérité invariable. Les studios créent des succursales, et les albums vendus en série limitée, parfois à compte d’auteur, ne témoignent même plus seulement du voyage, ils en sont aussi des substituts qui répondent à la demande d’une clientèle occidentale en manque d’exotisme et au nouveau slogan du Tour du Monde : « Voyagez dans votre fauteuil ! » (Bustarret, 1994, p. 67.) Plus rien ne résiste à l’emprise de la photographie. À Jérusalem, après le patriarche arménien Yessagi Garabedjan (1855), Garabed Krikorian s’installe en 1885. Les premiers studios de Tunis sont ouverts par J. Garrigues (1860) et M. Catalanotti, bien avant la mise en place du Protectorat. Tanger est la porte d’entrée pour le Maroc à partir des années 1870. Après 1912, le Maroc et la

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