Parenté | Bonte, Pierre

Parenté 1151 Parenté De prime abord, il n’apparaît pas un ordre unique de la parenté autour de la Méditerranée. Les terminologies de parenté, qui organisent lexicalement et structurellement les relations entre parents, relèvent majoritairement de deux traditions linguistiques, indo-européennes et sémitiques qui s’inscrivent diffé- remment dans les classifications anthropologiques, assimilées respectivement aux types « eskimo » et « soudanais », les terminologies turques étant pour leur part de type « iroquois ». Le fait témoigne surtout des limites de la démarche typologique, qui ignore de nombreuses particularités pourtant significatives de ces terminologies, et ne doit pas masquer certaines convergences des systèmes de parenté « méditerranéens » dont nous retiendrons deux aspects. Nombre de sociétés méditerranéennes sont constituées sur la base de groupes de filiation unilinéaire nommés qui organisent la transmission de biens matériels et immatériels, de titres et de statuts, etc. C’est le cas historiquement du gènos grec, de la gens romaine ou des lignées féodales et royales européennes, mais aussi dans la plus grande partie du monde musulman, citadin et rural, et sur- tout tribal : les liens généalogiques agnatiques (nasab) légitiment dans ce dernier cas des solidarités collectives (‘asabiyya) qui s’exercent pour la gestion de l’accès aux ressources, les alliances matrimoniales, pour le règlement des conflits, etc. Cependant, ces structures lignagères, contrairement aux fonctions qui caracté- risent généralement le lignage, ne sont pas exogames, et du fait de ces mariages endogames, la filiation est structurellement cognatique. En d’autres termes, elle se définit en ligne masculine et féminine, la filiation unilinéaire ne venant que comme un « argument », de droit par exemple, pour fonder et reproduire l’identité des groupes et leur pérennité intergénérationnelle. La notion de « mai- son », développée par Claude Lévi-Strauss, rend compte du fonctionnement de la parenté dans nombre de sociétés méditerranéennes, historiques ou modernes, transmettant biens matériels et symboliques en ligne filiative unilinéaire mais s’organisant en fonction du jeu des alliances. Les groupes patronymiques ( ‘aylât en arabe) et les réseaux de parentèle présentent de manière plus marquée encore

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