Navire | Buti, Gilbert

Navire 1087 – Eh non ! répondit un autre, c’est un pinque. Voyez son arrière relevé et le renflement de son étrave. – Ne serait-ce pas plutôt une polacre à voiles carrées ? » Cette embarcation, allant à la rame et sans doute initialement employée pour la pêche au filet (à l’instar du jebega encore présent en Espagne, près de Malaga, au milieu du xx e siècle), n’apparaît sous sa forme définitive qu’à la fin du xvi e siècle chez les Barbaresques. Intensément utilisée aux siècles suivants, elle disparaît progressivement au xix e siècle. Sur le plan architectural, le chebec présente des similitudes avec la famille des galères, étant long, bas sur l’eau, avec fine coque, lignes étroites et avirons de gouverne. Sa poupe est souvent formée d’une voûte assez longue surmontée d’un aménagement avec galerie. Dès l’origine, le chebec est gréé avec des voiles latines sur trois mâts ou « arbres à calcet » : mât de trinquet incliné sur l’avant, grand mât (mât de mestre) et mât d’artimon (méjane). Toutefois, comme beau- coup de bâtiments à voiles latines, il possède, notamment au xviii e siècle, un gréement double : latin par beau temps, carré par mauvais. Les armateurs, qui cherchent à la fin du xviii e siècle à accroître la vitesse de leurs bâtiments et à gagner en productivité en réduisant le nombre d’hommes d’équipage, essaient diverses combinaisons de gréement. Ainsi voit-on des che- becs portant des voilures de cutter, de brick, de brigantin, sans obtenir pour autant les performances meilleures que sous voiles latines. Cette transformation, totale ou partielle selon l’usage du navire, lui fait perdre ses qualités de marche et sa silhouette qui ont fait sa réputation. Pareillement, des tentatives pour gréer « à la chebec » d’autres types de bâtiments ne rencontrent pas davantage de suc- cès. Dans le calme, le bâtiment peut utiliser des rames, mais la configuration du pont impose alors de ramer debout face à l’avant ; les avirons sont glissés dans de petits sabords aménagés entre ceux destinés à l’artillerie car, contrairement à la galère, le chebec, dépourvu d’installations permanentes de vogue (rames), est armé de canons sur les flancs. L’importance de sa voilure, jusqu’à 800 m², en fait un des navires rapides remarquablement taillés pour la course tandis que son faible tirant d’eau lui permet de s’approcher du rivage et de remonter cer- tains estuaires pour effectuer des razzias. Les constructeurs majorquins sont réputés dans la fabrication de ce type de navire. Livourne, Gênes et Varazze, surtout, sont également des pourvoyeurs recherchés de chebecs ( stambecco ou zambecco en italien d’après le Glossaire nautique de Jal) ; ils diffèrent toutefois des espagnols, barbaresques ou grecs car ils sont relativement plus grands avec un creux plus important afin de pouvoir emmagasiner des marchandises. Il existe une infinité d’autres chan- tiers navals qui produisent des chebecs et qui ne peuvent être cités que très

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