Morisques | García-Arenal, Mercedes

Morisques 990 leur région d’habitation, de la législation locale, ainsi que de sa composition démographique. Autre facteur de variation : le temps, la fidélité à l’ancienne religion « s’effilochant » au fur et à mesure que des personnes et des groupes se christianisaient. La conversion En 1502, les Rois Catholiques, qui avaient expulsé les juifs d’Espagne en 1492 – l’année même où s’achevait la Reconquista avec la prise de Grenade –, décré- tèrent la conversion obligatoire au christianisme de tous les musulmans vivant sur les territoires de la couronne de Castille. Huit ans plus tôt, en 1494, ils avaient signé avec les Rois nasrides des Capitulations laissant la population musulmane libre de pratiquer sa religion. En revanche, ces conditions chan- gèrent après les soulèvements déclenchés par la pression évangélisatrice et celle des colons arrivant du nord. Les autorités chrétiennes considérèrent ces soulè- vements comme une violation des termes des Capitulations, lesquelles furent, par conséquent, abolies. Ce premier décret de conversion de 1502 n’affecta pas uniquement les Grenadins, mais tous les musulmans des territoires de la couronne de Castille, peu nombreux, dispersés, intégrés à la société, essen- tiellement des artisans des villes. Ce décret s’étendit ensuite en 1526 aux ter- ritoires d’Aragon et de Valence, où la population musulmane, principalement agricole et très nombreuse par rapport à la population chrétienne, était regrou- pée dans des zones géographiques déterminées, sur des terres seigneuriales, où elle était généralement protégée par les seigneurs, lesquels tiraient de gros bénéfices de son travail. Sur les territoires ibériques, ce fut donc la fin de l’exis- tence légale des musulmans – que l’on appela « mudéjares » durant toute la période médiévale. Simultanément aux décrets de conversion ou dans leur prolongement, fut promulguée une série de mesures destinées, pour certaines, à éliminer les différences – qu’on appellerait aujourd’hui « culturelles » – des nouveaux chrétiens (comme la musique, l’habillement, la coupe de cheveux, l’utilisation du henné et des toilettes, ou encore de la langue arabe), d’autres, à les placer dans une position sociale d’infériorité (comme l’interdiction de posséder des armes ou des esclaves). La plus importante de ces interdictions concernait la langue arabe : les Cortes Valencianas (parlement) en défen- dirent l’usage, écrit ou parlé, en 1564 ; Philippe II fit de même en 1567 dans un décret général interdisant également la mention des noms arabes et des lignages dans les documents économiques et notariaux tels que les actes de propriété. Ce décret provoqua la rébellion armée de Grenade, connue sous le nom de révolte des Alpujarras.

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