Madrague | Buti, Gilbert; Faget, Daniel

Madrague 811 Madrague Madrague. Si le mot se rencontre dans la toponymie du monde méditerranéen, ici le nom d’un quartier – Madrague Ville à Marseille –, là celui de petits ports – à Montredon, au sud de Marseille, et dans la presqu’île de Giens – ou encore celui d’une résidence célèbre – villa à Saint-Tropez –, force est de reconnaître qu’on en ignore bien souvent la chose qui reste pourtant en usage en certains points du littoral de la mer Intérieure. Pourtant, les madragues ont joué, surtout du xvii e au début du xx e siècle, un rôle important dans l’exploitation des richesses halieutiques et dans la vie des sociétés littorales. Cette technique, destinée à la capture des thons, se retrouve en de nombreux secteurs du bassin occidental de la Méditerranée. Ainsi, au début du xx e siècle, ces installations étaient encore nombreuses le long des côtes marocaines, algé- riennes, tunisiennes, libyennes, grecques, yougoslaves, italiennes, françaises, espa- gnoles et portugaises, suivant en cela le parcours de la migration des scombridés. L’étymologie même du mot « madrague » nous conduirait d’ailleurs à retrou- ver ces différents ancrages. Le terme français de « madrague », qui vient du provençal mandrago , semble emprunté à l’espagnol mâtiné d’arabe almadraga/ almazraba , sinon directement au latin ou au grec par l’association de mandra et d’ aqua . Selon le voyageur Pierre Augustin Guys (1721‑1799), ce système de pêche serait à rapprocher de la mandra , parc ou enclos, où l’on enfermait le bétail au temps d’Homère. La madrague apparaît donc tout à la fois comme un parc et un piège pour les thons. Ces engins qui demeuraient encore employés à la fin du xx e siècle en quelques points du littoral méditerranéen l’étaient peut-être déjà au début de notre ère quand Oppien (ii e siècle) mentionne la capture des thons à l’em- bouchure du Rhône : « Quand arrivent au printemps l’armée de thons, c’est pour les pêcheurs [dont les ancêtres ont habité autrefois la ville de Phocée] le signal des captures les plus riches et les plus abondantes. Tout d’abord, ils choisissent dans la mer, au pied de rivages escarpés, une anse qui ne soit pas

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