Fête | Reysoo, Fenneke; Fournier, Laurent Sébastien

Fête 536 particulièrement dans les zones rurales où les gens vivent habituellement dans de petits villages. On retrouve ainsi des secteurs séparés, une sociabilité intense, des achats quotidiens ainsi que de multiples occasions de se divertir. De même, dans les pays de l’Europe méridionale, les espaces de la fête sont des marqueurs sociaux importants. Dans de nombreux exemples, en Provence, dans les Alpes italiennes ou en Grèce, les fêtes locales comprennent un pèlerinage vers un point éloigné du territoire communal, associé au saint patron de la paroisse ou à ses ancêtres fondateurs (Isnart, 2008). Les rues et les places centrales des villages, en revanche, sont le plus souvent associées aux jeux, aux activités profanes et à la consommation partagée de nourriture et d’alcool. La diversité des manifestations et activités proposées engendre également une division sociale des tâches (semi-)professionnelles. Dans les pays du Maghreb, autour du lieu de pèlerinage dédié au saint, des gardiens, des descendants, des collecteurs de charité (sadaqa) , des dispensateurs de la bénédiction divine (baraka) interagissent avec les fidèles. Ces interactions s’appuient sur le rôle de média- teur du saint qui est censé intervenir auprès des forces divines afin de garantir la prospérité, la santé et le bonheur des adeptes. Un des événements fondamentaux de ces fêtes est le renouvellement du ser- ment d’allégeance au saint par ses divers descendants. Des hommes d’un certain âge prononcent le sermon d’affiliation et demandent d’abondantes récoltes, la paix parmi les descendants et le châtiment des criminels. Vient ensuite la visite (ziyâra) au tombeau du saint. Dans le sanctuaire, les fidèles invoquent la média- tion du saint pour résoudre leurs problèmes temporels (infertilité, mariage, suc- cès, etc.). En échange de la charité (sadaqa) qu’ils donnent aux descendants du saint (chorfa) , les fidèles reçoivent la baraka . La charité peut être effectuée sous forme d’argent, de nourriture ou d’un animal sacrifié. Le sacrifice correspond toujours à un présent collectif fait par une famille ou une communauté. En Europe, le culte du saint était assuré dans le passé par des confréries de jeunes gens. La plupart du temps transformées en groupes d’animation folklorique, ces confréries plongent leurs racines dans les corporations professionnelles ou dans les « abbayes de jeunesse » (Albera et Martini, 2002) qui, dans l’ancienne Europe, défendaient la communauté villageoise et étaient placées sous le patro- nage d’un saint. En Europe, bien que les logiques économiques et les logiques religieuses soient de plus en plus dissociées du fait de la sécularisation des sociétés modernes, foires et fêtes sont souvent associées. Le même phénomène s’observe dans le monde musulman. Dans les marchés (sûq) , on vend des denrées pour l’alimentation quo- tidienne (aliments divers, légumes, viande), ainsi que des produits qui contiennent la baraka , et qui sont appelés barûk . Il est essentiel de rapporter quelques-uns de ces articles chez soi pour que la baraka du saint insuffle des énergies propices

RkJQdWJsaXNoZXIy NDM3MTc=