Fascisme | Mourlane, Stéphane

Fascisme 528 à d’autres régimes et mouvements nationalistes et antidémocratiques et devient même, dans la seconde moitié du xx e siècle, une épithète banale pour désigner un adversaire politique, au point que selon Robert Paxton « tout le monde est le fasciste de quelqu’un ». D’un point de vue historiographique, la question du totalitarisme demeure centrale afin d’établir la cohérence d’une idéologie et d’une pratique politique complexes. Il ne s’agit pas tant de savoir si le fascisme est un totalitarisme, ce sur quoi chacun semble s’accorder, mais quelles sont les étapes, les gradations, les formes de radicalisation qui permettent une révolu- tion culturelle dans le but de transformer la société jusqu’à l’échelle de l’indi- vidu pour en faire un « homme nouveau ». Si les analyses peuvent diverger sur les scansions, les historiens se retrouvent obligés d’appréhender le « fascisme en action » (Paxton, 2004), de le saisir dans son développement et sa mutabilité. Par ailleurs, les travaux portent sur la « culture totalitaire » en tant qu’analyses des pratiques culturelles et d’une culture politique spécifique articulée autour de mythes, d’univers symboliques et de liturgies. Au travers de ces diverses formes de « sacralisation », Emilio Gentile voit ainsi dans le fascisme une véri- table « religion politique ». Au-delà de la pluralité des approches, de la variété des interprétations et de l’intensité des débats, quelques lignes de force se dégagent permettant, à défaut d’une définition, de baliser le champ d’étude que constitue le fascisme. Cette idéologie se nourrit largement du nationalisme et cristallise des rejets : anti­ libéralisme, antiparlementarisme, anticapitalisme et antimarxisme. Promoteur d’une révolution anthropologique, dont le chef charismatique incarne les ver- tus, le fascisme conçoit l’exercice du pouvoir sur un mode autoritaire dans un système où le parti unique vampirise l’État et sert de levier à l’embrigadement des masses dans une perspective organique et militariste. Si le recours à la pro- pagande vise à recueillir l’adhésion du plus grand nombre, la violence répressive est aussi mise au service de l’ambition totalitaire. Ces quelques principes ont été mis en œuvre dans l’Italie de l’après-Première Guerre mondiale où le fascisme apparaît dans une forme originelle en tant que mouvement puis en tant que régime. Le terme « fascisme » provient de la créa- tion par Benito Mussolini en 1919 des « faisceaux » italiens de combat dans un emprunt à l’emblème de l’autorité de la Rome antique et en référence à une tra- dition révolutionnaire spontanéiste de l’Italie des années 1890. Se rassemblent sous cette bannière des nationalistes, futuristes et anciens compagnons socialistes de Mussolini ainsi que des anarcho-syndicalistes. Le corpus idéologique n’est pas figé ; « notre doctrine, c’est le fait », estime Mussolini et ce n’est qu’en 1932, sous la plume du philosophe Giovanni Gentile, qu’est publié un premier essai de définition doctrinale. La guerre joue assurément un rôle matriciel : le fascisme trouve dans les frustrations de la « victoire mutilée » ainsi que dans le climat de

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