Énergie | Benalouache, Nadia; Duruisseau, Kévin; Daviet, Sylvie

Énergie 482 Les surplus agricoles encouragent le recours à la force motrice animale. Utilisée dans le domaine agricole, cette force devient, par ailleurs, un moyen de trans- port marchand et militaire. Toutefois, entre le IV e et le II e millénaire av. J.‑C., le domaine des transports connaît une révolution technique majeure : l’invention de la voile qui se diffuse depuis la mer Rouge et le golfe Persique, « pour la première fois dans l’histoire, les hommes [ont] pris le contrôle d’une puissance pratique- ment indépendante des plantes, qui n’[est] pas la simple multiplication de leur propre énergie ou celle des animaux » (Debeir, Deléage et Hémery, 2013, p. 88). Les conquêtes d’Alexandre qui permettent un brassage entre les civilisations méditerranéennes favorisent la diffusion et la rencontre entre les différentes filières énergétiques de l’Orient et de la Grèce (utilisation du vent, de l’eau et des ani- maux pour le transport ; de l’énergie thermique pour le travail des métaux et du verre, etc.). Mais la formation de l’Empire romain, vaste et fédérateur, marque véritablement l’avènement d’un système énergétique méditerranéen. Celui-ci conjugue progressivement l’utilisation des techniques énergétiques grecques et égyptiennes et exerce une mainmise sans précédent sur les ressources énergé- tiques du bassin méditerranéen. Ce système repose, cependant, et avant tout, sur une force motrice servile – esclaves – qui limite durablement la diffusion de nouvelles machines énergétiques. Il faut, par exemple, attendre le iii e et surtout le iv e siècle pour que le moulin à vent, inventé en Palestine, connaisse une large diffusion. Aussi, « la voie type de la croissance du système énergétique est géo- graphique plutôt que technique, extensive plutôt qu’intensive » (Debeir, Deléage et Hémery, 2013, p. 88). Avec la période médiévale, le système énergétique méditerranéen jusqu’alors dominant se reconfigure. En effet, un système énergétique occidental s’affirme et supporte, entre la fin du v e siècle et le début du xvi e , la diffusion accélérée de techniques existantes (moulins à eau). La mobilisation dans des propor- tions encore inconnues jusqu’alors d’animaux et de machines multiplie la force humaine : « Au terme de l’époque médiévale, c’est bien un nouveau système énergétique qui est en place en Europe. » (Debeir, Deléage et Hémery, 2013, p. 144.) Durant cette période, l’Occident médiéval accuse une série de mutations rapides qu’accompagnent à la fois les pénuries et les avantages comparatifs du continent européen et qui annoncent les grandes ruptures des siècles ultérieurs. Les révolutions industrielles en Occident entraînent une profonde rupture avec le système énergétique précédent et signifient l’avènement des énergies fos- siles au détriment des énergies de flux renouvelables. La dissociation du système énergétique occidental avec le système méditerranéen se confirme. Les révolu- tions énergético-industrielles successives se fondent sur une ressource spécifique – le charbon – et une technique nouvelle – la machine à vapeur. Or le charbon est une ressource presque inexistante dans les territoires sud-méditerranéens. Et

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