Course | Kaiser, Wolfgang

Course 319 comprenant aussi des captifs et des esclaves ; il aurait été une forme de course traditionnelle, typique de la Méditerranée, très proche de la piraterie. À côté de la course étatique – organisée par l’ordre à Malte, les autorités d’Alger, au xvii e siècle le sultan du Maroc –, existe et se développe une course menée par des entrepreneurs privés de la violence, en partie des « renégats », dif- ficiles à contrôler comme Simon Simonsen dit le Danseur [Danser] qui vient en Méditerranée avec des lettres de marque des États de Zélande pour courir contre les Espagnols, et passe ensuite à Alger, puis à Marseille. Les ports-phares de la course, Alger ou Livourne, mais aussi les ports atlantiques du Maroc, surtout Salé, connaissent un afflux de corsaires de la façade atlantique (Hollandais, Anglais, etc.) et de l’île de Corse, attirés par les conditions avantageuses qui leur sont offertes. L’ouverture de la course sur l’espace large de l’Atlantique donne lieu à des actions spectaculaires, comme le raid des Algérois en 1627 dans l’île d’Islande, et induit ou promeut des changements profonds de la course en Méditerranée, le déclin des galères au bénéfice de bâtiments mieux adaptés à la navigation océanique et à l’armement puissant en canons, et le renforcement de l’orientation économique de la course sur le butin, y compris humain : esclaves et captifs. L’intensité de la course provoque non seulement des mesures de protec- tion militaires comme les voyages en convoi et des opérations spectaculaires comme les bombardements d’Alger (1682, 1683 et 1688), mais s’accompagne aussi de sa réglementation croissante dans les accords de paix avec les territoires ottomans au Maghreb dans lesquels on essaie de protéger le commerce sous son propre pavillon, en payant le cas échéant un tribut. Que les flottes fran- çaises, anglaises, et plus tard suédoises n’arrivent pas, malgré leur puissance de feu nettement supérieure, à « réduire » les « États barbaresques » n’est qu’un paradoxe apparent. Il s’agit pour les puissances en Méditerranée d’instrumentaliser la course de l’adversaire contre leurs concurrents respectifs ; ce qui influence aussi la tactique des autorités maghrébines qui cherchent à ne pas être en paix avec toutes les puis- sances européennes en même temps. Paradoxalement, la course en Méditerranée est en même temps un terrain d’apprentissage important pour l’évolution du droit de guerre et du droit maritime, un mode de fonctionnement coutumier qui ne connaît un réel bouleversement qu’au début du xix e siècle. Wolfgang Kaiser ➤➤ Braudel (Fernand), captif, cités barbaresques, conflit, construction navale, esclavage, galères, Lépante (bataille de), mer

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