Cités barbaresques | Lafi, Nora

Cités barbaresques 249 Cités barbaresques Sous le terme « cités barbaresques » étaient désignées, sous l’Ancien Régime, les villes côtières de l’Afrique du Nord qui s’adonnaient à l’économie de course et à la piraterie (Bély, 1996, p. 127‑128). L’expression a été popularisée au xviii e siècle par toute une série de publications sur ce qui était aussi nommé parfois « régences » ou « états barbaresques ». Parmi ces ports méditerranéens on compte Alger, Tunis et Tripoli. On y adjoint souvent la ville de Salé, située sur la côte atlantique du Maroc. L’adjectif « barbaresque », aujourd’hui pour le moins désuet, est sans doute issu d’une longue histoire méditerranéenne de déri- vations du grec barbaros ( βαρβαροσ ). Le terme, employé dans les cités côtières hellénisées du pourtour méditerranéen sur le modèle de la distinction classique entre Grecs et autres peuples, désignait, de Phocée aux rives africaines et de la Sicile à la péninsule Ibérique, les peuplades de l’intérieur des terres, qu’elles fussent, selon les lieux et les époques, celtiques ou numides puis germaniques. Il semble être ensuite passé, par l’intermédiaire de la grande culture grecque des géographes arabes médiévaux, à la langue arabe, pour désigner, sous la forme « berbères », les populations de l’intérieur des terres de l’Afrique du Nord. Et en retour, la Berbérie semble être devenue Barbarie, et ses villes-ports barba- resques dans une désignation qui se répand à partir de la fin du Moyen Âge dans les langues latines. Celle-ci correspond à la période de mise en place de la très codifiée économie de course, système de saisie réciproque des navires dans lequel les puissances maritimes méditerranéennes s’affrontaient. C’est essentiel- lement entre la fin du xvi e et le xviii e siècle que le terme « cités barbaresques » connaît la plus grande fortune en langues française et italienne essentiellement, mais également en anglais et en allemand. Toute une littérature se développe notamment autour des récits de captifs (Anonyme, 1785 ; Laugier de Tassy, 1757 ; sur cette veine et son influence littéraire : Turbet-Delof, 1973, et sur le cas anglais : Matar, 2005). Il est à noter que jamais ce terme ou un équivalent n’est employé dans les sources arabes et ottomanes qui définissent ces villes, inté- grées à partir du xvi e siècle dans l’empire, en fonction de leurs formes de vassalité

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