Bertrand, Louis | Dusserre, Aurélia

Bertrand, Louis 158 Bertrand, Louis (1866‑1941) Académicien polygraphe et maître de la littérature coloniale algérienne, Louis Bertrand a beaucoup voyagé autour de la Méditerranée, où il a trouvé un épa- nouissement personnel ainsi que les fondements de sa doctrine. Né en mars 1866 à Spincourt, en Lorraine, Louis Marie-Émile Bertrand garde de son enfance un souvenir triste, grandissant dans un milieu familial conservateur et étriqué, qu’il s’efforcera de reconstruire a posteriori en s’in- ventant dans son autobiographie une identité de méditerranéen – espagnol par son père et italien par sa mère. Après un passage à l’École normale supé- rieure, il entame, sans gloire ni motivation, une carrière dans l’enseignement secondaire qui le conduit à Aix-en-Provence en 1888. À l’inverse de Marseille, la ville lui laisse une impression très défavorable, mais il y côtoie un milieu intellectuel très actif. Les héritiers du mouvement félibrige ont contribué, en effet, au renouveau de l’intérêt pour les régions et les peuples méridionaux, notamment autour de l’idée latine, qui marque profondément Louis Bertrand. Construite autour de l’existence d’une communauté linguistique et biologique, la latinité est en outre conçue comme une réalité d’ordre éthique et moral : il existerait ainsi un ethos méditerranéen, héritage antique conservé et récupéré par les peuples romans. Cette vision s’accompagne d’un dessein politique : la latinité est conçue comme un lien entre des peuples de nationalités diffé- rentes unis par leur appartenance commune aux rives de la Méditerranée – que Mistral conçoit dans son Ode à la race latine (1878) comme « la mer sereine… cette mer toujours souriante… comme la ceinture éclatante qui doit lier les peuples bruns ». Le mouvement de renaissance latine formule donc comme idéal politique le fédéralisme, pensé comme la solution aux grandes questions politiques et sociales. En 1891, Louis Bertrand apprend sa mutation à Alger, ce « Midi et demi » où il s’installe en septembre. Il découvre avec enthousiasme la capitale d’une colonie en pleine mutation ; ses promenades et la fréquentation du monde des petits métiers lui ouvrent les portes de l’Alger populaire qui est l’essence de ses

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