Alimentation | Herrscher, Estelle; Saunier, Elia; Sauvegrain, Sophie-Anne

Alimentation 75 début des années 1950. Cette période, située après la rémission des conséquences de la guerre mais avant l’apparition, des fast-foods, renvoie ainsi aux régions médi- terranéennes dont la principale source lipidique est l’huile d’olive. Les pays se rap- prochant le plus de ce régime sont la Crète (d’où le terme « régime crétois »), l’Italie du Sud et certaines régions de la Grèce, mais également l’Espagne, le Portugal et le midi de la France. Les nombreuses études épidémiologiques réalisées dans ces régions ont montré un taux de maladies cardiovasculaires et de cancers très bas, à cette époque, malgré des services médicaux limités, associé à un état de santé général et une longévité de leurs habitants nettement meilleurs comparativement à des sujets du Nord de l’Europe et des pays anglo-saxons. Le dénominateur commun à ces études est bien entendu un régime alimentaire caractérisé par une consommation importante de fruits, légumes, pain et céréales, pommes de terre, légumineuses et graines, sous forme de produits locaux de saison peu transformés. En revanche, on retrouve peu de poissons et encore moins de produits laitiers, hormis le yaourt et le fromage. La viande était encore plus rare, accompagnée de vin. En résumé, on considère qu’un habitant de la Méditerranée consommait, en moyenne, quatre fois plus d’huile d’olive, deux fois plus de poisson, plus de légumes (60 %), plus de fruits (10 %), plus de céréales (20 %), moins de produits laitiers (50 %) et moins de viande (40 %) qu’un Nord-Européen. Cette alimen- tation, associée à une activité physique régulière, a notamment été popularisée par la « pyramide du régime méditerranéen ». Il s’agit d’une représentation sous forme de pyramide des différents aliments du régime méditerranéen, selon leur fréquence d’absorption. De la base vers le sommet on trouve : céréales, fruits, légumes et légumineuses, huile d’olive, produits laitiers, poissons, volailles, œufs, sucreries et enfin viande rouge. Le vin, avec modération, est indiqué à côté de la pyramide. Cette pyramide, créée en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé en 1994 (Willett et al ., 1995), a été corrigée depuis par la Fondation Diète méditerranéenne et présentée lors du VIII e congrès international sur l’ali- mentation méditerranéenne en 2010, à Barcelone. Depuis les années 1950, l’alimentation en Europe, notamment celle de la rive nord de la Méditerranée, a subi d’importantes modifications ; on parle de tran- sition nutritionnelle (Padilla, 2000). L’adoption du modèle américain de poly- culture et d’urbanisme, l’engouement pour les produits industriels et l’apparition de la « triade voiture-supermarché-congélateur » ont contribué à cette transition. La frugalité a laissé place à l’abondance et se traduit par une forte augmentation de la ration calorique. L’émancipation des femmes méditerranéennes, tradition- nellement valorisées par leur savoir culinaire, a entraîné une réduction du temps de cuisine, et une désorganisation du cadre familial et social des repas. Enfin, le tourisme et les migrations ont banalisé les aliments exotiques. Ces muta- tions gagnent désormais les autres rives de la Méditerranée. Ces changements

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