Alchimie (Antiquité) | Viano, Cristina

Alchimie 59 plus fréquemment admise pour l’étymologie du mot arabe est une transcrip- tion du grec chumeía / chêmeía (fusion, alliage), par l’intermédiaire du syriaque kîmîyâ . Le périple de l’alchimie est avant tout méditerranéen : l’alchimie latine est entièrement fondée sur les textes arabes, qui ont eux-mêmes hérité avant tout de l’alchimie grecque hellénistique, transmise aux alentours des viii e -ix e siècles, le plus souvent via des intermédiaires syriaques. Deux idées reçues doivent être rectifiées. Les alchimistes ne sont générale- ment pas des fanfarons ou des farfelus, mais bien souvent des personnages à la pointe de la science de l’époque : une majorité des recettes alchimiques sont véri- diques et peuvent être reconstituées, et la production de l’or et de l’argent est loin d’être le seul objet des traités. Il faut également mentionner que les alchimistes ne séparent que très rarement théorie et pratique : cette conception est plutôt moderne, et les auteurs antiques et médiévaux ne se représentent jamais les tech- niques en dehors des cadres conceptuels dont ils ont hérité ou qu’ils ont élaborés. Antiquité Les alchimistes gréco-alexandrins faisaient remonter l’origine de leur art à l’Égypte ancienne, thèse que la plupart des historiens ont suivie. On a aussi supposé des relations avec l’alchimie mésopotamienne, indienne et chinoise mais, au-­ delà de certaines parentés de thèmes ou de procédés, on n’a, à présent, aucune preuve décisive d’une influence réciproque. En effet, l’alchimie grecque est un phénomène particulier, éminemment alexandrin et « méditerranéen », à la fois complexe et unique en son genre, né à la confluence de traditions techniques, intellectuelles et religieuses propres à l’Égypte gréco-romaine. Les alchimistes se définissent eux-mêmes comme des « philosophes », Platon et Aristote appa- raissent en tête des listes des anciens maîtres de l’art, certains d’entre eux sont appelés « exégètes de Platon et d’Aristote ». L’intérêt des Modernes pour l’alchimie grecque fut suscité par les travaux du chimiste Marcelin Berthelot, Les Origines de l’alchimie (1885) et la Collection des anciens alchimistes grecs (1888‑1889) [ caag ], qu’il publia en collaboration avec l’helléniste Charles-Émile Ruelle. L’approche historique de Berthelot était essentiellement rationaliste. Il voyait dans l’alchimie l’origine de la méthode expé- rimentale et la préparation de la chimie moderne. La Collection fut considérée comme plutôt faible du point de vue de la rigueur philologique, mais elle eut le grand mérite de diffuser ces textes et de stimuler la recherche érudite. Entre 1924 et 1932 furent publiés les huit volumes du Catalogue des manuscrits alchimiques

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