Paul Decaux : Le soldat, almanach pour 1901

- 78 - « Le sous-officier évite le coup, safait vivement le furiemc par derrière. l'enl'ace de ses bras, le désarme, cherche à Je dégriser, et, de guerre lasse, par une inspiration toute mili– taire, d'une voix forte et impérieuse, il l'interpelle par son nom. A cet accent co4nu, le clairon revient àlui, le regarde et lui dit : "Ah! c'est toi! T'es un bon copain! ,, « Profitant de cet instant de répit, le sergent l'entraîne par le bra&, rom.pt la foule qui s'écarte, et pour élou!Ier la voix du braillard, lui apj}li'(rue. ses gants surr- la bouche, en guise de bâillon•. Bref, après des efforts inouïs, il arrive à la caserne, en franchit le seuil au moment où le premier coup de neuf heures sonnait, pousse son paquet hurlant au milieu de la chambrée, le remet aux mains de sept ou huit cama– rades, heureusement seuls présents, qui le déshabillent, le fourrent sous sa co.uverte où il ne tarde pas à s'a[aisser ivre-mo11t. « Ce.la fait, le généreux sous-0fficie11 leur recommande le silence sttr toute· l'affaire, et va s'enfermer dans sa chambre, épuisé de fatigue, mais bénissant Dieu de ce sauvetage d'un bra\\e garçon, ordinairt>ment sobre et bon soldat. " Le lendemain matin, à l'aube du jour, il est réveillé par le bruit de sa porte qui s'ouvre ; il se lève et voit son clai– ron qu.i, sanglotant, noyé de larmes, se joebte à ses pieds, lui baise les mains, lui demande pardon, l'appelle son sauveur, son ami, son père, et ne s'arrête qu'en sentant le sergent l'atlirer sur son cœur et l'embrasser en frère. " « Le second trait, non moins héroïque, peut ~e raconter en quelques lignes. Il s'agit encore d'une folle ivresse. débl:lt ordinaire des drames de caserne. CeHe fois, ce sont !c; carnaradeo du soldat ivre qui l'entourent, l'entraînent, Je protègent contre lui-même et le ramènent épuisé et furieux au quartier. En entrant dans la chambrée, ils aperçoivent, http://e-mediatheque.mmsh.univ-aix.fr Corpus | Trésor de la médiathèque

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