Paul Decaux : Le soldat, almanach pour 1901

- 57 - dans ]P.s débuts, toujours durs, du service et depuis deux ans qu'ils partageaient en Afrique les mêmes fatigues et les mêmes dangers. Leur caractère cependant était aussi différent que lçur personne. Ardent, emporté, colère jusqu'à en perdre la rai– son, Gaillot, avec sa physionomie mobile, ses yeux, sa moustache et ses cheveux noirs, sa petite taille et sa car– rure, réalisait le type de ces races du Midi, plus passionnées que réfléchies. Dur pour ses hommes, bien qn'au fond.bon de nature, il n'eût peut-être recueilli autour de .,lui qu'anti– pathies et jalùusies sans son extrême bravoure qui lui gagnait tous les cœurs. Cordelet, au contraire, doux et réfléchi, les traits calmes et sérieux, la taille haute et plutôt mince, joignait à tout autant d'audace plus de calme et de sang-froid, et son humeur toujours égale lui avait attiré l'estime moins chaude mais plus profonde peut-être du soldat. Il y avait plus d'un mois qu'on avait pénétré dans l'Aurès. La marche était difficile, les étapes dures; sans cesse des pentes e5carpées, à gravir et à de5cendre; une chaleur torride; l'eau rare; chaque jour la disparition ou la mort de quelques hommes derrière un buisson ou un rocher dissi– mulant un ennemi, et jamais de combat, jamais la grande émofron d'une bataille pour le lendemain ou la griserie de la lutte qui retrempe les cœurs et les courages. Aussi le moral de la troupe allait-il s'affaiblissant de ces fatigues 5ans fin, de ces escarmouches incessantes avec un invisible ennemi. C'était à ces pensées que s'arrêtait l'esprit du sergent Cordelet qui, dans la nuit tombante, le 8 juin 1845, revenait d'établir la ligne des sentinelles de sa demi~section chargée http://e-mediatheque.mmsh.univ-aix.fr Corpus | Trésor de la médiathèque

RkJQdWJsaXNoZXIy NDM3MTc=