Paul Decaux : Le soldat, almanach pour 1901

- 52- jour, il refit, au milieu des balles qui sifflaient à ses oreilles, à travers les rues étroites de la ville, le long chemin qùi séparait son palais du quartier des chrétiens. li perdit plus de sept de ses compagnons tués à ses ·côtés; mais, à la fin du jour, il avait réussi à mettre en sûreté onze mille cliré– tiens dans la citadelle et trois mille dans ses jardins. Au milieu de la nuit, les bordes furieuses >e précipilenl au couvent des sœurs de la 111i-éricon.le qui, tremblante.~, attendaient agenouillées le sort des Fnrnciscains. A la lueur des torches al'paraît l'émir. Levant ses bras en signe de protection, il écar[e les massacreurs et conduit avec ~es gens, au milieu des plus grandes difficullés, les sœurs et leurs deux cenls petites filles dans la maison de ses servi- teurs. ' Le lendemain malin, Ab~-el-Kadcr se présente chez le gouverneur lurc et lui reproche son inaclion et sa condes– cendance pour les meurtriers. « C'est une honte pour l'islam, lui dit-il, de se livrer à de pareilles horreurs. Si vous n'avez pas le courage de rétablir l'ordre, dounrz-moi des fusils, et je m'en charge. » Une heure après, on lui apportait quatre cents fusils; mais, en même temps, un mot ainsi conçu: d Si j'ai un con;;eil ù vous donner, ne prenez pas les armes conlre la population mahométane. li vant mieux pour vous de ne pas vous mêler de' celte affaire. » Al.Jd-el·Kader comprit la menace cachée sous cet avis : mais au lieu de l"e!frayer, l'anuouc~ du péril Jui rendit une nouvelle audace. oc Qu'ils m'attaquent, s'ils l'osent », s'écria-t-il, rés0lu à périr pour défendre la vie de ses protégés. Et, aussitôt, il organisa la défense. li remit aux mains de tous les chrétiens valides les fusils qui étaient en sa possession; puis, par petits groupes, il http://e-mediatheque.mmsh.univ-aix.fr Corpus | Trésor de la médiathèque

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