Paul Decaux : Le soldat, almanach pour 1901

- 30 - rPvolver en pleine fi gure il l'étend à ses pieds. La situation est critique, l'ennemi est à deux pas de nous; il a des baïon– nettes et nous n'en avons pas; nos fusils sont brûlants. On entend des gémissements et des cris de tous les côtés; les éclats de roches pleuvent avec les balles. « Un Français, F. Franc, atteint à la tête, crie en tom– bant : « J'ai mon affaire, mon général; vive la France! 11 La blessure n'est pas grave; la balle, entrée près de l'œil, est sortie près de l'oreille en effleurant celle-ci. Il se relève, mais reçoit une balle à l'épaule, qui sort au milieu du dos. Mon ami de Bardin, blessé au bras droit, dit au général qui est à côté de nous : « Mon général, notre but est manqué; " nous sommes cernés de toutes pa.rts, il est inutile de « sacrifier ta.nt d'existences en prolongeant un aussi inégal " corpbat. Rendons-nous. - Vous croyez, dit le général. « 'Eh bien! puisqu'il le faut, rendons-nous. » Et comme, toujours debout, il sort de sa poche son mouchoir pour l'agiter, il tombe frappé par une balle tirée à bout portant par un soldat. Nous nous àpprochons, mon ami de Bardin et moi, pendant que les autres agitent leur mouchoir. Le général est étendu, les yeux ouverts, ses lèvres tremblent. li porte au téton droit une large blessure dont le sang s'échappe en bouillonnant, faisant de gros caillots. Je me penche et l'embrasse en pleurant. « On dirait que Dieu a voulu épargner à ce brave entre tous la souffrance qu'éprouve tout homme de cœur à ~e rendre. 11 Le général de Villebois-Mareuil fut enterré par les soins des officiers anglais au pied du kopje où il avait trouvé la mort et son corps restera sur la terre qu'H a si vaillamment défendue. Avant de partir, pressentant la mort comme prochaine, il avait demandé dans son testament à être inhumé <i: là où http://e-mediatheque.mmsh.univ-aix.fr Corpus | Trésor de la médiathèque

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