Zones marines protégées | Briand, Frédéric

Zones marines protégées 1575 n’a jamais paru aussi fragile, en raison des menaces conjointes qu’y font peser un trafic maritime intense, l’épuisement des stocks halieutiques, la pollution, le chalutage profond, la poursuite de la chasse baleinière sous le prétexte fallacieux de recherche scientifique, l’exploration pétrolière et minière des grands fonds – et bientôt la prospection de ressources génétiques marines. Devant cette montée des périls, un groupe de travail spécialisé des Nations unies a été créé en 2006 afin d’élaborer le cadre juridique nécessaire à une pro- tection de la biodiversité en haute mer, par le biais notamment de directives pour la sélection de Z ones marines protégées internationales couvrant les domaines du pélagique et du profond. Malgré des avancées récentes (2015), ce groupe demeure freiné par des désaccords profonds entre tenants du partage équitable des ressources marines et ceux qui prônent un accès simplifié aux pays dispo- sant des moyens technologiques nécessaires. Le cas spécial de la Méditerranée Une demi-douzaine d’États ont, jusqu’à présent, déclaré de manière unilatérale leur Zone économique exclusive en Méditerranée, dont tout récemment la France, créant par un décret en date du 14 octobre 2012 une zee méditerranéenne qui remplaçait la Zone de protection écologique établie en 2003 sur le même péri- mètre. Est-on passé ainsi d’une volonté de protéger à une volonté de combiner exploitation et conservation ? L’inquiétude est réelle à ce sujet. Lorsque la totalité des 22 pays riverains aura suivi cette direction – ce qui semble probable à relative- ment court terme, compte tenu des dimensions réduites de cette mer régionale –, aucun point de la Méditerranée n’échappera à ce processus national d’appropria- tion. Les eaux internationales auront alors cessé d’exister… et les différents États n’auront d’autre solution que de construire, d’égal à égal, une cogouvernance maritime enfin digne de ce nom, avec l’appui et les dispositifs renforcés des orga- nismes pertinents tels que la Convention de Barcelone, la Commission interna- tionale pour l’exploration scientifique de la Méditerranée ( ciesm ), l’Union pour la Méditerranée et l’Organisation maritime internationale ( omi ). Quelques signes semblent annoncer l’avènement de ces temps nouveaux. En 1999, la France, Monaco et l’Italie ont ainsi signé un accord tripartite créant le « Sanctuaire Pelagos pour les mammifères marins » qui couvre un large sec- teur du bassin liguro-provençal (planche XXX). Il s’agissait là, du moins sur le papier, d’une des premières zones protégées en haute mer au monde. Deux ans plus tard, cette zone a été annexée en tant qu’Aire spécialement protégée d’impor- tance méditerranéenne ( aspim ) internationale à la Convention de Barcelone. Le Sanctuaire Pelagos présente cependant des faiblesses liées à l’absence de moyens de surveillance et de renforcement en mer, et à la paucité des effectifs et des budgets engagés. Ainsi, aucun des navires battant pavillon étranger n’est aujourd’hui tenu

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