Tsiganes | About, Ilsen

Tsiganes 1495 qualification des communautés sous l’effet des recompositions nationales, et ce qui apparaît aujourd’hui comme une classification anthropologique résulte en réalité d’une définition produite par un modèle de catégorisation à la fois ethnique et politique qui s’étend en Europe après 1815. Ces nouvelles formes d’assignations identitaires, caractéristiques de l’époque contemporaine, s’accé- lèrent ensuite avec le renforcement des États-nations puis avec le démantèle- ment des empires centraux et de l’Empire ottoman au lendemain de la Première Guerre mondiale. Sous l’effet de ces changements majeurs suscités par une nou- velle administration territoriale des populations, la position des « Tsiganes » se transforme progressivement en une question d’ordre politique. La répartition des sociétés romanies subit la transformation des cadres éco- nomiques et le développement de l’économie agraire alors que les liens entre le plat pays et les villes évoluent en favorisant l’insertion régionale et la spécialisa- tion socio-économique. Des communautés se redéfinissent ainsi à l’intérieur de territoires de mobilités et d’échanges extrêmement délimités. Dans la France du Sud, par exemple, coexistent plusieurs ensembles qui n’ont pas nécessairement de relations entre eux : les Manouches d’Auvergne, les Gitans catalans urbanisés de Toulouse, Perpignan et Marseille, les Boumians provençaux, les Sinti d’ori- gine piémontaise, alsacienne ou des pays de la Loire installés dans le Sud-Ouest, ou des groupes devenus totalement invisibles comme les membres de la bour- geoisie urbaine des marchands de chevaux de Montpellier. C’est précisément sur cette appartenance territoriale que s’élabore une contribution aux mouve- ments régionalistes et folkloristes. Par exemple, le marquis Folco de Baroncelli inscrit la présence gitane dans la culture provençale. En 1935, il obtient l’auto- risation de l’archevêque d’Aix et Arles d’organiser le 24 mai de chaque année, aux Saintes-Maries-de-la-Mer, la procession de Sara (la « sainte » des Gitans), encadrée par les Arlésiennes et les gardians de Camargue. Dans les autres pays de l’Europe méridionale, une multitude de sous-groupes, de clans, de tribus se répartit selon une double appartenance fort malléable, à la fois géographique et professionnelle, dont certaines caractéristiques perdurent jusqu’à aujourd’hui : les Kalderash chaudronniers, les Lovara maquignons, les Tchourara fabricants de tamis, les Boiash ou Ursari montreurs d’ours, les Aurari ou Zlatari orpailleurs. Cette diversité traduit une adaptation avérée aux transformations des sociétés européennes, dans leur dimension rurale et urbaine, comme en témoignent les Tsiganes qui se spécialisent dans les métiers forains (chanteurs de rue, acrobates, musiciens, montreurs d’animaux) et ambulants (chiffonniers, repriseurs, rem- pailleurs, vanniers, ferrailleurs). Un virage répressif peut être observé à partir des années 1890, lorsque l’état de Tsigane est assimilé à celui du paria, confondu avec l’étranger, le vagabond ou le criminel, autant de figures négatives consolidées alors par les sciences

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