Temps | Chiffoleau, Sylvia

Temps 1436 au pape Grégoire XIII la tâche de réformer le calendrier (1582). Rapidement adopté par les pays catholiques, le calendrier grégorien l’est de façon plus réti- cente par les nations protestantes, et se voit franchement rejeté par le monde orthodoxe. Désormais, en Méditerranée, la Chrétienté se divise aussi sur la ques- tion du calendrier. Mais, placé dans l’escarcelle des missionnaires, le calendrier grégorien part à la conquête de l’Orient. Ce n’est pas sans difficulté toutefois qu’il s’impose dans les Églises latines, et, jusqu’au cœur du xix e siècle, la ques- tion de son adoption, réclamée par Rome aux catholiques d’Orient, a provoqué de nombreux conflits au sein de cette communauté. Les héritages et les emprunts de calendriers ont ainsi atteint une telle complexité qu’en Égypte, dès le début du xix e siècle, un almanach synthétique de poche est imprimé annuellement sur les presses gouvernementales de Boulaq. Basé sur l’an- née solaire, commençant et se terminant avec l’équinoxe de printemps, il donne, pour chaque jour, le jour de la semaine et le mois selon les calendriers musulman, copte, julien et grégorien. Il indique les étapes du Soleil dans le zodiaque ainsi que l’heure de son lever, du midi et de son coucher. Il liste les principales fêtes religieuses des différentes communautés et, à la manière des calendriers agricoles et des anwâ’ , il comprend toute une série de notations et de conseils pratiques. À la fin du siècle, ce type d’almanach populaire fleurit également à Istanbul. Mais cette profusion calendérique est ébranlée lorsque l’Europe mène son offensive multiforme d’occidentalisation du monde au cours du xix e siècle, qui touche aussi la question du temps. Au sud de la Méditerranée, les étrangers et les Levantins sont les premiers à utiliser le calendrier grégorien, lequel pousse son avantage au fur et à mesure que s’impose la nécessité de synchroniser les activités, notamment économiques, d’une rive à l’autre, et bientôt à l’échelle du monde. Toutefois, si pour des raisons pratiques le calendrier grégorien a fini par devenir partout dominant au xx e siècle, il coexiste étroitement, au Maghreb et au Moyen-­ Orient, avec les autres calendriers qui continuent de structurer la vie religieuse et liturgique des différentes communautés. Si la datation selon l’ère de l’hégire est désormais peu utilisée dans la vie courante, le vendredi est jour chômé dans la plupart des pays musulmans, et le calendrier musulman rythme par ailleurs profondément la vie sociale de la région, avec les trois scansions majeures du ramadan, du pèlerinage à La Mecque et de l’Aïd al-Adha. Les chrétiens catho- liques et la plupart des orthodoxes fêtent Noël à la même date du 25 décembre, date fixe établie sur la base du calendrier grégorien, alors que les Arméniens le fêtent le 6 janvier. La fixation de la date de Pâques obéit en revanche au calen- drier julien pour les orthodoxes et se trouve donc célébrée généralement à une date différente de la Pâque catholique. Désormais largement confinées au registre religieux, les références calendaires n’en demeurent pas moins plurielles. Mais qu’il s’agisse, pour l’islam, de s’affirmer face à l’hégémonie du calendrier

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