Portulan | Vagnon, Emmanuelle

Portulan 1291 et la Méditerranée, ou la provenance de l’or africain. Au xvi e siècle, les cartes s’inspirent des récits de voyage des premiers explorateurs du Nouveau Monde pour figurer les peuples indigènes d’Amérique du Sud, leurs vêtements, leurs mœurs et leur habitat. Selon le lieu de production des cartes, elles sont reliées à des traditions artistiques ou « écoles » reconnaissables à leur style, plus ou moins décoratif. Les cartes vénitiennes ou hollandaises, plus sobres, s’opposent ainsi aux styles catalan, portugais, normand ou marseillais, chargés et colorés. Mais tous les styles intermédiaires existent, y compris dans la production d’un même atelier ou d’un cartographe, et le degré de décoration dépend également de la fonction des cartes et de leur commanditaire. Les portulans et les cartes marines ont d’abord attiré l’attention des historiens du xix e siècle dans le cadre d’une histoire positiviste et progressiste des « grandes découvertes » et des progrès des connaissances géographiques. Par opposition aux mappemondes médiévales, représentations schématiques de la totalité du monde, simplifiées et qu’on croit toujours peuplées de monstres et de merveilles, les portulans et les cartes marines étaient présentés comme des outils de navi- gation, issus de la pratique et de l’expérience des marins, et fondés sur la pre- mière représentation exacte et « moderne » de l’espace méditerranéen. L’étude de ces textes et de ces cartes a été renouvelée depuis les années 1980, notamment par les travaux de P. Gautier Dalché, T. Campbell, C. Astengo et R. Pujades. L’opposition entre les milieux savants, monastiques, et la cartographie des marins a été relativisée. Les mappemondes sont contemporaines des cartes marines. Les livres d’instructions nautiques, comme les cartes marines conservées jusqu’à nos jours, sont bien souvent des exemplaires soignés, parfois dédicacés à de puissants personnages. Ils étaient connus dans les milieux cultivés et pouvaient être uti- lisés avec d’autres types de textes géographiques et de cartes, pour donner une image encyclopédique du monde. Pujades a montré, par ailleurs, la large diffu- sion des cartes marines entre le xiii e et le xv e siècle. Il en existait à tous les prix, variables selon le raffinement de leur décoration. Leur présence est attestée fré- quemment à bord des navires, avec le compas à pointe sèche et la boussole, mais aussi dans les inventaires après décès et les actes notariés, ou encore dans les col- lections de riches bibliothèques. Dans certains cas, il existait un contrôle d’État sur la production des cartes à Gênes, puis en Espagne et au Portugal, notamment au début du xvi e siècle, à l’époque des premières explorations territoriales en Afrique et en Amérique. La Casa de Contratación en Espagne ou l’Armazém au Portugal étaient des administrations officielles où étaient recueillies les données rapportées par les navigateurs. La synthèse de ces informations servait à confectionner le padrón real , carte modèle qui devait servir pour toutes les autres cartes utilisées par les marins. Les compagnies commerciales, comme la voc (Compagnie

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