Portulan | Vagnon, Emmanuelle

Portulan 1290 parcourues d’un réseau de lignes en étoile indiquant les huit directions princi- pales de la rose des vents, appelées lignes de vents ou lignes de rhumbs, subdi- visées en seize, puis trente-deux directions secondaires. Elles sont munies d’une ou de plusieurs échelles graduées, ou échelles de distances en milles, qui éta- blissent un rapport mathématique entre l’espace réel et sa représentation carto- graphique. Dessinées sur une seule peau d’animal (veau ou mouton, dont on voit parfois encore l’emplacement du cou) ou sur plusieurs peaux assemblées, elles se présentent également sous forme d’atlas de cartes régionales, collées sur ais de bois ou de carton et maintenues par une reliure. L’échelle de la représen- tation est très variable selon les documents, depuis les planisphères sur lesquels le tracé des côtes est stylisé jusqu’aux cartes de détail donnant avec précision le relevé du littoral et, à partir du xvii e siècle, des indications de profondeurs. Comme pour les portulans textuels, l’origine des cartes marines et les pre- mières méthodes d’élaboration sont mal connues. Le système de lignes de vents n’a pas son équivalent dans les cartographies antiques ni arabes antérieures au xiv e siècle, et les cartes marines arabes ou ottomanes sont des copies ou des adaptations d’exemplaires latins. L’hypothèse la plus probable est que les cartes marines sont issues de relevés côtiers effectués avec une boussole et ensuite assem- blés. La déclinaison magnétique (la différence, variable selon les époques, entre le nord magnétique de la boussole et le pôle Nord terrestre) produit une défor- mation de la Méditerranée de 5 à 10 degrés sur les cartes les plus anciennes : le détroit de Gibraltar est dessiné à la latitude d’Alexandrie, alors qu’il se trouve environ à la latitude de Rhodes. La longitude pouvait être calculée à terre par l’observation des éclipses ; en revanche, ce n’est qu’à la fin du xviii e siècle que l’invention de l’horloge marine (travaux de John Harrison, 1693‑1776) permet le calcul fiable de la longitude à bord des navires traversant les océans. Le décor est très variable selon les lieux de fabrication et les commanditaires. Les cartes les plus sobres sont rehaussées de liserés de couleurs le long des côtes et sur les îles et les estuaires. Les plus ornées sont couvertes d’indications à l’in- térieur des terres, sous forme de vignettes et de symboles : relief, hydrographie, personnages, villes, pavillons, animaux, végétation. Elles sont souvent enlumi- nées : figures de saints rehaussées d’or dans les angles de la carte, encadrements de rinceaux et de fleurs, cartouches et roses des vents. À partir du xvi e siècle, on voit aussi représentés sur certaines cartes des monstres marins, des personnages mythologiques et des instruments de navigation. Ainsi, ces documents nous renseignent non seulement sur la géographie physique mais aussi sur l’histoire, l’économie et les enjeux politiques de l’espace représenté. C’est notamment le cas des cartes catalanes médiévales (Angelino Dulcert, 1339, Atlas catalan de 1375, Mecia de Viladestes, 1413), qui men- tionnent la route des épices, contrôlée par le sultan d’Égypte, entre la mer Rouge

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