Plantes médicinales | Bellakhdar, Jamal

Plantes médicinales 1260 par leurs rivaux, mais rien n’y fera : à partir du viii e siècle, en médecine, la pré- éminence passera définitivement entre les mains des savants de langue arabe. La nouvelle médecine arabo-judéo-perse, qui acheva pratiquement de se constituer au x e siècle, était en effet incomparablement plus riche que la science physiologique grecque, bien qu’elle fût, dans ses structures de base, construite autour de la théorie des humeurs d’Hippocrate, elle-même inspirée de la théo- rie antique des quatre éléments redéfinie par Aristote en théorie des quatre qua- lités élémentales. Selon Aristote, la matière est constituée de quatre éléments – le feu, la terre, l’air et l’eau –, chacun d’eux possédant en propre une qualité dont il est à la fois détenteur et producteur : la chaleur pour le feu, le froid pour la terre, la séche- resse pour l’air, l’humidité pour l’eau. Chaque corps, pris séparément, est consti- tué d’un mélange différent de ces quatre éléments, et c’est donc la proportion dans laquelle sont représentés dans ce corps les quatre principes élémentaires qui fera son identité, ses propriétés. Appliqué à la physiologie humaine, ce sys- tème de pensée donna naissance à la doctrine des tempéraments, des proprié- tés naturelles et des humeurs, doctrine que la nouvelle génération de savants apparue au sein de la civilisation arabo-islamique associa brillamment à la thé- rapeutique des contraires. Cette association fructueuse donna naissance à un art médical rénové, établissant comme postulat fondamental l’interdépendance du microcosme qu’est l’organisme humain et du macrocosme qu’est l’univers, ce qui rendait possible une approche globalisante de la maladie et de la santé. En règle simple, une maladie donnée était combattue à l’aide de médicaments doués de propriétés antagonistes. Mais les natures et tempéraments des indivi- dus étaient aussi pris en compte dans la prescription des traitements. Il en résul- tait que le choix, parmi toutes les substances antagonistes, de la plus appropriée au cas considéré était parfois une affaire très complexe. Ainsi, on ne soignait pas selon des modalités analogues un flegmatique et un bilieux, même atteints d’un mal identique. Il y avait là, incontestablement, un grand progrès par rapport à ce qui se faisait jusque-là. Ce fut aussi historiquement l’une des raisons qui pous- sèrent ces médecins de la nouvelle école à chercher pour leurs pharmacopées des drogues sans cesse nouvelles, des traitements spécifiques de plus en plus person- nalisés. D’où la grande place réservée communément dans leurs droguiers à la nou- veauté et aux médications observées chez d’autres peuples, sous d’autres latitudes, traduisant en cela une ouverture d’esprit remarquable aux médecines étrangères. Cette nouvelle approche de la maladie et des remèdes, révolutionnaire en son temps, connut ses heures de gloire avec des savants qui furent tout à la fois méde- cins et pharmacognostes, comme l’étaient Yahia ibn Massawaih (viii e -ix e siècles), al-Râzî (ix e -x e siècles) et Ibn Sînâ (x e -xi e siècles), tous trois Persans au service de princes arabes ; Isaac ibn ‘Amrân (x e siècle), Ibn Soleyman al-Israili (x e siècle)

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