Photographie | Mégnin, Michel

Photographie 1233 avec un portrait post mortem de Ramsès II. Aussi exceptionnel est l’impact des photographies des « empreintes humaines » de Pompéi grâce aux moulages de plâtre réalisés par l’archéologue Fiorelli dans les espaces créés par la désintégra- tion des cadavres. Si John Henry Parker fait aussi travailler des photographes sur les sites antiques de Rome, l’école britannique reprend la tradition des vedute pittoresques que le développement du tourisme international fait prospérer. James Robertson dispose des figurants sur les sites antiques d’Athènes (1853‑1854), et c’est avec une sophistication extrême que Rudolf Lehnert (1878‑1948) met en scène la présence mélancolique des autochtones sur les grands sites de l’Égypte pharao- nique. La photographie nourrit la nostalgie romantique de l’hypnotique contem- plation des ruines. Certains y voient un pouvoir occidental de « supervision », d’autres la mise en abyme de la succession des civilisations. Mais avec le dévelop- pement du tourisme (Cook, le chemin de fer), les studios multi-reproduisent ces groupes escaladant les pyramides, lointains successeurs du mannequin de paille jadis fabriqué par Henri Cammas et du figurant nubien terrorisé par Du Camp aux fins d’apposer par l’immobilité une échelle humaine à la grandeur de l’his- toire millénaire. Le reportage d’un siècle La photographie immobilise le temps, témoignant notamment du passé, mais c’est aussi le reportage d’une histoire en mouvement qui s’écrit en même temps que la photographie étend son empire. Les prises de vue sur le vif des éruptions du Vésuve (Sommer, 1872) donnent ainsi un relief particulier à la résurrection de Pompéi. Toujours en Italie, Gustave Le Gray illustre la grande affaire du siècle, le Risorgimento, car Le Gray n’est pas seulement le photographe des fameuses marines au large de Sète (1857), accompagnant Garibaldi en 1860 et photographiant les ruines spectaculaires de Palerme après les combats victorieux des Mille. La même année, le voyage à Alger de Napoléon III est le premier déplacement d’un chef d’État qui fait l’objet d’un reportage avec un catalogue algérien incluant des vues du débarquement de l’escadre impériale aussitôt édité par Disdéri, photographe officiel de l’empereur. L’affaire est d’importance au moment où Napoléon rêve d’un royaume arabe sous influence française et que Félix Jacques-Antoine Moulin consacre à l’Algérie un album de 300 images dont les fameux bureaux arabes et des écoles pour indigènes mises en scène (1856‑1857). Pourtant, après la cou- verture photographique des travaux du canal de Suez (Arnoux, 1854‑1859), les photographies du bombardement britannique sur Alexandrie sonnent le glas de l’influence française en 1882 : les légendes des tirages s’écriront désormais en anglais. Suivi par Krikorian jusqu’à Jérusalem, le voyage du Kaiser Guillaume au cœur de l’Empire ottoman bouscule ce jeu franco-britannique en servant les

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