Photographie | Mégnin, Michel

Photographie 1232 Tripolitaine rendent définitivement les armes. Pourtant, La Mecque est prise sans aucun coup de fusil. En 1880, c’est le premier photographe égyptien connu, Muhammad Sâdiq Bey, qui photographie Médine et le lieu le plus sacré de l’islam. La Méditerranée prend même des couleurs : Jules Gervais-Courtellemont laisse un nombre considérable d’autochromes sur l’Espagne, le Maghreb et l’Empire ottoman. Après les derniers feux du pictorialisme (Echagüe au Maroc, Frechon en Algérie, Kuhn en Italie), l’âge d’or de la carte postale (1900‑1914) achève la constitution d’un catalogue où les légendes s’échangent d’un pays à l’autre et concentre aujourd’hui toutes les critiques : « degré zéro de la photographie » et tour du propriétaire obscène. Malgré le studio Flandrin au Maroc, il ne sur- vit pas vraiment à la Grande Guerre (rachat du studio Geiser en 1925) et moins encore à la crise de 1929 (déclin du studio Lehnert & Landrock). L’empire photographique se lézarde au même rythme que les empires méditerranéens. Le temps photographique et l’histoire Le rapport de la photographie à l’histoire est évidemment une affaire de « temps ». Pas seulement le temps de pose suspendu dans une immobilité sans laquelle l’image pourrait disparaître, mais cet ensemble de questionnements où mémoire, instantané et immortalité définissent un certain nombre de fonctions et de caractéristiques. S’y ajoute l’ambition du témoignage et de la preuve : « […] les photographies ne sont pas que des histoires, ce sont aussi des faits dotés d’une force de conviction brute. » (Salzmann, 1856). Rapportée aux vestiges des civi- lisations antiques, aux trois monothéismes et au siècle de l’expansion coloniale, cette question méditerranéenne est d’importance. L’archéologie et les ruines Le plaidoyer d’Arago de 1839 en faveur du daguerréotype souligne « l’immense parti qu’on aurait tiré, pendant l’expédition d’Égypte, d’un moyen de reproduc- tion si exact et si prompt ». C’est orienter la photographie vers l’archéologie au moment où la science remplace les pillages. Les exemples de collaboration entre l’archéologie et la photographie ne manquent pas : Maxime Du Camp entend rapporter une « reconstitution exacte » des vues les plus célèbres d’Égypte, de Syrie et de Palestine (1849‑1850). Auguste Salzmann se met au service d’une thèse archéologique pour dater les remparts de Jérusalem. John B. Greene, lui-­ même archéologue, procède à des fouilles à Thèbes et en Algérie. En Égypte, à partir de 1859, Mariette travaille avec Théodule Devéria, Aymard de Banville rejoint la mission en 1863 avec Emmanuel de Rougé et Émile Brugsch, colla- borateur de Maspero, photographie la fameuse « trouvaille » des momies royales

RkJQdWJsaXNoZXIy NDM3MTc=