Parc naturel | Chalvet, Martine

Parc naturel 1140 donc une création sociale qui témoigne d’une transformation des usages et des représentations sociales de la nature. Recoupant des réalités et des représentations extrêmement diverses, les « parcs naturels » sur le pourtour méditerranéen sont difficiles à appréhender tant les fonctionnements, les objectifs et les acteurs sont variables. Cette difficulté est d’autant plus grande que chaque pays possède sa propre classification des espaces protégés, et que chacun s’inscrit dans des contextes socio-économiques profon- dément hétérogènes avec des situations locales très différentes. Si certains tra- vaux de géographes et de sociologues ont cherché à mieux comprendre cette nébuleuse, il n’existe pas d’étude complète sur l’espace méditerranéen. Les mono- graphies ne rendent pas compte de la diversité des approches et les études sur le phénomène à l’échelle mondiale sont trop générales et ne prennent pas en compte l’espace méditerranéen de manière spécifique. Cette synthèse est d’au- tant plus complexe à tracer que l’espace méditerranéen présente des visages très divers et qu’il est lui-même doté de limites souvent imprécises et fluctuantes. Pourtant, il existe bien des espaces protégés sur le pourtour méditerranéen, espaces qui ont une histoire et qui jouent un rôle écologique, économique, social, politique et culturel. Depuis les années 1960‑1970, il existe même une volonté commune de coordonner et de mettre en réseaux ces espaces à l’échelle méditerranéenne. Suivre la genèse puis l’affirmation des « parcs naturels » sur le pourtour méditerranéen, sans esquiver les questions du succès et des limites de ce type d’entreprise, permet de mener une réflexion sur les enjeux écolo- giques, économiques, politiques, sociaux, culturels et identitaires des politiques de protection des espaces. En étudiant les différents acteurs en présence et leur motivation, les types d’espaces choisis, les objectifs de ces politiques et les amé- nagements proposés, cette histoire des « parcs naturels » pose aussi les questions des spécificités du pourtour méditerranéen, mais également des identités natio- nales et régionales, des politiques d’intégration. En Italie, en Espagne, en Grèce, mais également en Tunisie, en Algérie et au Maroc, des espaces protégés ont été mis en place au début du xx e siècle. Espaces privés comme la réserve de Camargue (1927), sites protégés à la suite de la loi Beauquier sur les espaces patrimoniaux français (1906), réserves naturelles ou le plus souvent parcs nationaux, ces types d’espaces protégés, en dépit de leurs dif- férences, répondaient à une même volonté de sauvegarde de la nature. À première vue, cette volonté n’apparaît pas nouvelle. Dès le Moyen Âge, il existait bien des espaces protégés de toute action anthropique : réserves de chasse, réserves de bois de futaies ou « solitudes boisées ». Toutefois, au début du xx e siècle, la création des espaces protégés s’est inscrite dans un nouveau contexte. Les acteurs, les objectifs et les modalités de ce mouvement étaient inédits. Certes, en Italie, les premiers parcs nationaux (parcs des Abruzzes et du

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