Opéra | Lapied, Martine; Lhâa, Alexandre

Opéra 1119 toujours considéré par le père comme un « vil séducteur », même lorsque ses intentions sont pures. De nombreux pères verdiens font preuve de férocité, leur blessure devant la « trahison » de leur fille provoquant en eux une passion vengeresse sans pardon, une véritable fureur destructrice vis-à-vis de l’amant mais aussi de leur enfant. Les conflits sont issus non seulement des passions transgressives éprouvées par les héros et les héroïnes, mais également du contexte politique intérieur et extérieur. Les luttes internes sont le ressort de plusieurs opéras dont l’intrigue se déroule en Italie. Les luttes de clans sont la toile de fond de presque tous les opé- ras situés dans le Moyen Âge ou la Renaissance italienne. En fin de période, dans Tosca , les luttes sont devenues celles qui opposent les révolutionnaires aux tyrans. Dans l’opéra romantique les héros sont passionnés, ils sont fiers et jaloux de leur honneur comme de leur amour ; ce sont souvent des guerriers prêts à mourir pour leur cause. À leur côté, les héroïnes, amoureuses, ont une voca- tion sacrificielle, même (et surtout) si elles essaient de s’opposer à leur destin. En effet, certaines héroïnes s’affirment comme transgressives. C’est le cas de Mireille, jeune fille de 15 ans, qui se dresse contre l’autorité paternelle, ce qui la conduit à la mort. Tosca, incarnation de la diva italienne, n’est déjà plus une héroïne romantique traditionnelle, mais elle présente l’image d’une femme ardente, passionnément amoureuse mais dévote de la Madone, voire superstitieuse. Néanmoins, la pieuse Tosca, au paroxysme de la douleur morale, ne craint pas d’aller jusqu’au meurtre. L’héroïne la plus évidemment transgressive est Carmen. La gitane sensuelle se veut libre de son corps, mais elle se montre soumise au destin qui punit cette liberté de la mort. Le thème de la gitane est récurrent depuis le xvii e siècle dans la société espagnole. Les gitans, qualifiés d’« égyptiens », sont alors identifiés comme méditerranéens, avec des cheveux et des yeux noirs, un teint olivâtre. Alors qu’ils seraient probablement originaires de l’Inde, la plupart d’entre eux parlent de l’Égypte, où leurs migrations ont pu les conduire, comme de leur patrie primitive d’où ils tireraient leurs pouvoirs occultes. Cette provenance supposée leur vaut le nom d’Egyptanos d’où découlent les termes de Gitans et Gypsies. Au-delà d’un certain orientalisme, leur costume est finalement identique à celui de certaines catégories de la société espagnole, en Andalousie par exemple. Les conflits, voire les combats, jalonnent l’œuvre où abondent les marginaux, de la bagarre des cigarières, en passant par la violence de Don José, les actions des bandits andalous jusqu’à la scène finale où la corrida de Séville évoque à la fois les origines lointaines de la civilisation méditerranéenne depuis la Crète et sa violence. La représentation de la tauromachie est issue de toute une tradition espagnole depuis le xviii e siècle. À la fin de l’opéra, la mise à mort du taureau correspond à celle de Carmen.

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