Opéra | Lapied, Martine; Lhâa, Alexandre

Opéra 1117 qui enchante aujourd’hui encore les foules dans les mises en scène « pharao­ niques » du Stade de France ou des arènes de Vérone, est d’autre part caracté- ristique du goût pour le passé qui s’exprime dans l’opéra romantique : un passé qui recèle d’intéressantes possibilités de mises en scène dramatiques et permet de monter des tableaux à grand spectacle dans lesquelles le musicien peut faire retentir des chœurs éclatants tels que la célèbre marche triomphale. Le monde biblique est prisé par le romantisme qui, s’il fait encore des incur- sions dans l’Antiquité, délaisse pour lui la mythologie païenne. L’opéra roman- tique a, par ailleurs, fréquemment représenté les conflits qui opposèrent les deux rives de la Méditerranée au cours de la période médiévale, qu’il s’agisse des croisades (Jérusalem) , de la lutte pour la domination de la péninsule Ibérique (Pelagio) , ou des affrontements entre Turcs et Vénitiens (Maometto II) . Les périodes proches ou contemporaines de celle de la création sont plus rarement mises en scène. C’est le cas d’œuvres dont l’intrigue s’organise autour de l’enlève- ment d’Européens par des corsaires (L’Italiana in Algeri) , ou plus récemment de Teneke de F. Vacchi dont l’action se déroule dans la Turquie des années 1950. Enfin, l’opéra a multiplié les représentations de la rive nord de la Méditerranée, qui constitue l’aire la plus exploitée pendant la période romantique, l’Italie four- nissant le décor de la majorité des intrigues. Une aire géographique caractérisée par le soleil, la lumière, la mer C’est principalement dans le courant romantique qui mêle lyrisme personnel et communion avec la nature que l’on trouve une caractérisation du milieu natu- rel méditerranéen à travers la luminosité, le soleil, le bleu du ciel et de la mer. L’opéra Mireille de Gounod, dont la première version date de 1864, veut représenter la Provence. Il s’inspire de l’œuvre de Frédéric Mistral Miréo . La Provence qui est mise en scène est pastorale. Les oliviers et les chênes font le lien entre la Provence et la Grèce antique. Le soleil, le ciel sans nuages tiennent une place essentielle puisque Mireille meurt de l’insolation que lui vaut sa traversée du désert de la Crau vers les Saintes-Maries où elle décède devant une mer inon- dée de soleil. C’est un climat lumineux mais dur. Les crues du Rhône, le désert de la Crau et son soleil écrasant sont des ressorts de l’opéra. L’Espagne de Carmen évoque aussi la lumière de la Méditerranée et sa vio- lence. Pour Nietzsche, Carmen est une musique de « pays chaud ». Il évoque la « limpidezza » de l’air, loin des brumes wagnériennes (Friedrich Nietzsche, Le Cas Wagner, Lettres de Turin de mai 1888, lettre 2). Ce n’est pas toujours le monde des rivages qui est représenté et la mer joue rarement un véritable rôle dans les opéras. Lorsque la Méditerranée est évo- quée, elle est vue comme espace de joie et de liberté ou comme un élément violent que les hommes doivent vaincre. Calmes, les flots peuvent être une

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