Navire | Buti, Gilbert

Navire 1091 cette dernière est remplacée par un foc de grandes dimensions dont la manœuvre exige toutefois un nombre plus réduit d’hommes d’équipage. Un complément de voilure peut être assuré par l’installation d’autres voiles à l’arrière. Dans tous les cas, en l’absence de vent, les hommes se servent de rames glissées sur le pont. Si les tartanes apparaissent généralement comme des bâtiments « à tout faire » on les distingue quelquefois en fonction de leurs usages, comme le fait Jean Jouve dans l’ Album Colbert . Ainsi trouve-t‑on des tartanes de lest, desti- nées au transport de pierres ou de sable, des « tartanes de pêche » et des « tar- tanes de négoce ». Les premières ne sont jamais armées tandis que les tartanes de commerce le sont parfois avec des pierriers prenant appui le long du bord, et plus rarement avec 2 à 4 canons pour les plus grosses. Elles sont utilisées pour le petit comme pour le grand cabotage, allant « à la cueillette », au gré des affrètements pour cargaisons réduites, convenant admirablement aux échelles de Barbarie, aux établissements de Morée et de Crète, aux voyages vers l’Archi- pel (Cyclades en mer Égée), se faufilant d’île en île. Comme pour la majorité des bâtiments de mer, la propriété de la tartane est généralement fractionnée en 24 parts (quirats ou carats) et sert de support à de véritables entreprises dont les profits et pertes se répartissent au prorata de la propriété et des inves- tissements effectués à l’occasion de chaque expédition. Appréciées pour leur manœuvrabilité et leur célérité, elles ont été utilisées comme avisos, garde- côtes et bâtiments corsaires portant alors jusqu’à 80 hommes d’équipage. Sûres et légères, échappant ainsi plus commodément à la poursuite des corsaires, la chambre de commerce de Marseille leur a confié le service des dépêches char- gées d’aller porter les nouvelles de la guerre, des mouvements de convois et de corsaires. Enfin, il semblerait que des tartanes de certains ports provençaux, tels Saint-­ Tropez ou Cannes, aient été conçues pour le transport du vin ; le pont de ces « vinaitiers » était pour cela aménagé et calibré pour y recevoir la futaille comme l’attestent des cartes postales au début du xx e siècle. En France, l’État fait construire au xviii e siècle des tartanes pour le compte de sa marine mais en affrète un plus grand nombre pour assurer ses transports ou ravitailler ses escadres lors de certaines expéditions comme celles préparées à Toulon à destination de Minorque (1756) ou de l’Égypte sous la conduite de Bonaparte (1798) ; à cette occasion, plusieurs tartanes furent réquisitionnées par la République et incorporées dans les convois pour le transport de vivres, chevaux et fourrages. Étroitement associée à la pratique du petit cabotage, la tartane se trouve fortement concurrencée à partir de la fin du xix e siècle par le rail puis la route. Néanmoins, ce type de bâtiment, modeste mais ayant été omniprésent sur le littoral méditerranéen durant plusieurs siècles, y compris sous des appellations

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