Navire | Buti, Gilbert

Navire 1089 période révolutionnaire résulte d’une multitude de causes, notamment de l’ha- bitude d’armer des bâtiments légers pour conduire une course littorale. Les uns se livrent à la course « pure », d’autres privilégient la « course et marchandises » car ils n’ont pas besoin d’attendre les convois pour partir, et, longeant plus près le bord de mer, ils peuvent forcer le blocus et s’adonner à la course au retour. Leur tonnage est moins important que ceux utilisés dans la marine marchande, car ils excèdent rarement 60 tonneaux, et leurs gréements sont indifféremment carrés ou latins, reflétant souvent l’origine géographique du navire : on peut dire, en schématisant, latins pour les chebecs grecs, espagnols, barbaresques et carrés pour la plupart des italiens et des français. Au milieu du xix e siècle, la marine française, qui a abandonné ce type de bâtiment pour la guerre, en utilise encore un comme garde-côte pour surveiller les rivages, remplir des missions spéciales, secrètes, ou en aviso. Elle en confie aux Douanes pour lutter contre la contrebande, d’autant que le chebec apparaît comme un des bâtiments qu’affectionnent les contrebandiers ! L’utilisation des chebecs dans les pays barbaresques s’est également bien réduite au xix e siècle, même si quelques unités se trouvent toujours dans les ports de Tunis, de Tripoli et, dans une moindre mesure, d’Alger. Les équipages d’un chebec de la marine marchande sont aussi nombreux que ceux d’un brigantin ou d’une polacre dont le tonnage est autrement plus impor- tant. Aussi, l’utilisation d’un chebec rapide en tant que navire de commerce n’attire les armateurs de la marine marchande que pour armer en course en période de guerre. La crise que traverse la course dans la première moitié du xix e siècle contraint les armateurs à convertir les chebecs au cabotage. Ainsi, le Payan Latour , construit en 1810 à La Ciotat pour aller en course, et transformé en 1813, en accroissant son volume de charge pour l’adapter au commerce, est qualifié tantôt de « chebec », tantôt de « tartane » ; converti en bombarde en 1820, avec des longueur et largeur modifiées et une portée diminuée, il est transformé en brick-goélette, portant deux mâts à voiles carrées, en 1821, avant de faire naufrage en 1824 sur l’île de Lampedusa. Il en est de même pour la Syrène , chebec anglais construit aux Baléares, transformé en brick à Gênes en 1816 pour servir de bâtiment de commerce et transporter des agrumes et du bois entre la France, la Ligurie et la Catalogne. Cette nouvelle affectation impose des changements techniques. Par là même, le chebec perd de son identité pour devenir pinque, brigantin, polacre, brick ou mistic. Ce n’est qu’en Espagne que son emploi au commerce est attesté jusqu’au début du xx e siècle. Peu utilisé au commerce, le chebec disparaît néanmoins plus tardivement dans cet usage, les derniers étant encore en activité au lendemain de la Première Guerre mondiale.

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