Musulmans | Frégosi, Franck

1063 Musulmans rattachées à l’Empire romain et dont le profil religieux avait été marqué par le polythéisme, le judaïsme et diverses expressions du christianisme (montanisme, arianisme, monophysisme, nestorianisme…). Si l’islam, notamment au Maghreb, s’est imposé comme la religion de l’écra- sante majorité des populations locales berbérophones et arabophones, dans le reste du pourtour méditerranéen la présence de vénérables communautés chré- tiennes antérieures à l’avènement de l’islam (les Coptes en Égypte et les syriaques en Syrie et au Liban) devait contribuer à faire de la diversité religieuse une réalité incontournable avec laquelle l’islam ancien avait su intelligemment composer, là où certains islams contemporains semblent avoir plus de difficultés. Y compris là où l’islam demeure démographiquement dominant à l’instar du Maghreb, l’islamisation progressive de la société n’a jamais totalement éliminé les pratiques dévotionnelles coutumières, ni les lieux investis par la religiosité populaire antérieure à l’implantation de l’islam (sources, grottes, arbres, mon- tagnes…). Là aussi, le pluralisme religieux, au sein même de l’univers musulman, continue de l’être en dépit de dynamiques politico-religieuses d’uniformisation de la pratique musulmane. Face à un islam de lettrés plutôt urbains, résolument scripturaire aux forts accents dogmatiques et juridiques, se déployèrent tout au long de l’histoire d’autres tonalités religieuses davantage tournées soit vers l’ef- fervescence mystique à l’instar des nombreuses déclinaisons du soufisme plu- tôt que vers la religion légale, soit vers l’univers du culte des saints où l’histoire hagiographique des saints illustres rencontre la mémoire des saints populaires (Dermenghem, 1954). Si la version sunnite de l’islam domine dans l’ensemble du Maghreb, d’autres versions de l’islam perdurent localement. Il en va ainsi de l’islam kharijite présent dans le Mzab ainsi que dans l’île de Djerba. Il convient également de rappeler que la dynastie chiite ismaélienne des Fatimides prit son essor depuis la ville de Mahdia en Tunisie avant d’étendre sa domination sur l’Égypte, l’Arabie occidentale et la Syrie. Gardons-nous de passer sous silence le fait que le fondateur de la lignée des Idrissides au Maroc revendiquait une ascendance avec la lignée du Prophète via son gendre ‘Alî. L’islam sunnite domine politiquement également à l’est du Maghreb, depuis la Libye, en pas- sant par l’Égypte, la Palestine, jusque dans la Turquie laïque, mais il cohabite par endroits avec d’importantes communautés chiites, comme au Liban, ou issues du chiisme (druzes du Liban et alévis de Turquie), sans oublier qu’en Syrie le pouvoir est détenu par la minorité alaouite qui est, elle-même, issue du chiisme duodécimain. Bien que l’islam soit, sur tout le pourtour sud de la Méditerranée, non seu- lement la religion massivement pratiquée, mais aussi la religion officielle des régimes et des élites en place, l’islam règne sans nécessairement gouverner tous les aspects de la vie. Au cours de leur longue histoire, ces sociétés se sont dotées

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