Musulmans | Frégosi, Franck

Musulmans 1062 ou à Ben Laden. Relève également de cette catégorie l’« islamminimal » ou « rési- duel » des élites musulmanes laïques qui ne renoncent pas pour autant à mettre en avant leurs origines islamiques pour mieux se démarquer de toutes les expres- sions islamiques contemporaines radicales. Une autre variante se retrouve en creux dans certains types de discours se voulant décomplexés (sans fausse révérence) par rapport à l’islam et aux populations musulmanes, selon lesquels la « nor- malité religieuse », aujourd’hui, résiderait dans une nécessaire prise de distance par rapport à toute pratique, toute attitude et toute revendication empruntant le canal rhétorique, le vocabulaire religieux. Ce qui peu ou prou, s’agissant de l’islam, revient à postuler que par ricochets la forme religieuse « déviante », la religion hors norme seraient paradoxalement les diverses expressions de l’islam orthonormé sinon orthodoxe. C’est autour de cette question délicate de la redéfinition des contours des communautés musulmanes d’Europe et de leur insertion dans les sociétés euro- péennes que se joue le devenir de la référence à l’islam au nord du bassin médi- terranéen (Göle, 2015). Aussi des décisionnaires musulmans (clercs religieux et intellectuels), résidant dans l’espace européen, ont-ils été amenés à requalifier légalement (par rapport à la légalité islamique) le contexte dans lequel vivent les musulmans qui résident en Europe, et à évoquer la question sensible de l’oppor- tunité d’adopter a minima une législation islamique adaptée au vécu des musul- mans d’Europe. Parallèlement à ce processus interne, certains gouvernements européens, la France en particulier, se sont dotés de législations encadrant de façon restric- tive la visibilité sociale de l’islam (lois sur le voile simple et intégral), cherchant maladroitement à limiter la présence urbaine de l’islam. Comble du paradoxe, c’est aussi en France que le gouvernement et la représentation nationale se sont prononcés favorablement au développement de produits financiers conformes à l’éthique économique islamique. L’islam et les musulmans de la rive sud de la Méditerranée Sur cette rive, l’islam apparaît comme une donnée résolument diachronique. Si en Ifriqiya , en Égypte et dans le reste de la façade méditerranéenne du Machrek, sa présence remonte aux conquêtes du califat d’Umar (634‑644), son expansion au Maghreb commença vers 670 sous la dynastie omeyyade et s’est poursuivie sous les dynasties fatimide, almoravide, almohade, mérinide, hafside… L’islam finira par s’imposer comme la religion dominante au sein de sociétés auparavant

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