Mozarabes | Bosseman, Gaelle

Mozarabes 1022 comme une menace potentielle, les mozarabes, qui n’ont pu ou voulu émigrer, doivent faire face à la politique de répression des Almoravides. Ces derniers esti- ment qu’en accordant leur soutien à Alphonse I er ils ont brisé les conditions de la dhimma . Une première expulsion des chrétiens de la région de Grenade est orga- nisée en 1126, puis de nouvelles mesures touchent d’autres régions andalouses en 1138 et 1170. Cette politique, poursuivie par les Almohades, conduit certains chrétiens à la conversion afin d’échapper aux persécutions et de conserver leurs biens. Ainsi, les communautés mozarabes s’éteignent progressivement pour sur- vivre encore quelque temps dans le Nord de la péninsule, notamment à Tolède. Le rôle culturel des mozarabes Le tournant de l’arabisation à la fin du ix e siècle distingue deux phases dans la production écrite mozarabe : une en latin et une en arabe. La littérature latine andalouse se caractérise par sa nette orientation religieuse. Plusieurs correspon- dances témoignent de l’existence de débats parmi les communautés chrétiennes sur la question des frontières intercommunautaires : les clercs condamnent, dès les années 730 et de manière récurrente, l’adoption par des chrétiens de pratiques jugées inspirées par la coexistence, telles la circoncision ou le refus de consom- mer de la viande non vidée de son sang ou de porc. Les actes d’un concile tenu à Cordoue en 839 révèlent à l’inverse l’existence de communautés chrétiennes refusant strictement toutes formes de contact intercommunautaire, perçu comme une véritable souillure. Cette communauté jugée fanatique est condamnée pour son rigorisme par l’Église andalouse, démontrant ainsi qu’un siècle après la conquête l’Église adapte son discours à la situation de coexistence. Parmi les textes du corpus latin, deux ensembles se distinguent par leur importance et par l’attention qu’ils ont suscitée chez les historiens, la controverse adoptianiste et le corpus des martyrs de Cordoue ; l’un soulève le thème de la corruption de la foi chrétienne par la coexistence avec la religion musulmane, l’autre présente un groupe de chrétiens intransigeants au point de rechercher le martyre plu- tôt que de se compromettre avec l’islam. La querelle adoptianiste oppose, à la fin du viii e siècle, l’Église mozarabe représentée par le métropolitain de Tolède, Élipand, aux théologiens francs, asturiens et romains sur la question de la filia- tion, naturelle ou adoptive, de la nature divine du Christ. Diverses correspon- dances et des traités théologiques opposent Élipand et le clergé mozarabe aux théologiens francs et asturiens dans une controverse christologique complexe qui s’étend sur un peu plus de deux décennies et réunit quatre conciles. Malgré une rapide disparition, l’adoptianisme semble avoir introduit un soupçon d’hétérodoxie qui pèsera longtemps sur les mozarabes. A contrario , le corpus

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