Mosaïque | Blanc-Bijon, Véronique

Mosaïque 1006 soumis au tribut, leurs esclaves barbares n’ont pas à être déclarés sur la liste du cens ; ils ne sont pas appelés à payer l’impôt des marchands sur leurs produc- tions propres ; sans payer de loyer, ils peuvent obtenir des boutiques et des ate- liers dans des lieux publics ; ils ne peuvent être obligés à décorer des édifices publics sans salaire ( Cod. Theod ., XIII, 4, 4 = Cod. Iust ., X, 40, 8). Le terme architectus rencontré sur deux mosaïques désignerait davantage le commandi- taire que l’artisan : Q. Amiteius à Luc-en-Diois et Q. Mutius (en grec) sur le nymphée de Segni. Une technique particulière est mentionnée par Pline citant un vers de Lucilius : « Arte pavimentui atque emblemate vermiculato » ( Hist. nat. , XXXVI, 185). Si opus vermiculatum est une occurrence moderne, Lucilius associe les termes ver- miculata et emblema . Liée au latin vermicula , « petit ver », cette technique se pré- sente comme un assemblage d’éléments de très petites dimensions (3 à 4 mm de côté) – régulièrement taillés ou simples éclats – et de très faible épaisseur (1 ou 3 mm) ; emblema (= « chose insérée », du grec ἐμβάλλω ) désigne une mosaïque amovible, réalisée en atelier sur un support indépendant : caisson à rebords, plat ou simple brique. Très lourds, les caissons en marbre (Ampurias, emblema aux poissons) demandaient à être fortement évidés ; au début du i er siècle av. J.‑C., en Italie, des mosaïstes essaient le travertin, plus léger mais fragile (Paestum, Pompéi, Chiusi, Agde…) ; dès le milieu du i er siècle av. J.‑C. apparaissent les supports en terre cuite qui autorisent plus de diversité dans les formats. Une couche unique, voire deux, d’un mortier grossier est appliquée dans le caisson, avant le bain de pose des tesselles. Certains emblemata ont pu aussi être réalisés sur des supports en matériaux périssables (bois, natte, toile…). De très haute qualité tant technique qu’iconographique, les emblemata en opus vermiculatum sont des mosaïques de maîtres. À côté des œuvres de Sosos de Pergame citées par Pline, la signature de Dioscouridès de Samos sur deux emblemata d’une même maison dite de Cicéron à Pompéi souligne le rôle majeur joué par les mosaïstes issus des grands centres hellénistiques. Les emblemata pou- vaient aussi bien être insérés dans des sols qu’être exposés et déplacés comme des « mosaïques de chevalet ». De véritables collections réunissent des emblemata réalisés par des mains différentes (à Baccano, Zliten, Lambèse…) ou tous sem- blables (Zliten) ; avec un décor identique à cette dernière série de Zliten, l’ em- blema de la villa de Gurgi relève d’un même atelier de production. À ce jour, aucune boutique-atelier n’est identifiée et seuls les emblemata attestent un travail pouvant être effectué dans un espace distinct de celui à déco- rer. À cette exception près, la pose directe, à même le terrain, semble seule uti- lisée dans l’Antiquité. L’existence de cahiers de modèles n’est pas assurée (voir discussions autour du Papyrus d’Artémidore ), mais de nombreux tracés prépara- toires sont désormais connus, réalisés par le mosaïste avant la mise en place des

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