Mille et Une Nuits, Les | Garcin, Jean­Claude

Mille et Une Nuits, Les 939 M ille et U ne N uits , L es De par son origine, le recueil des Mille Contes , d’origine sassanide, passé en arabe en Irak au viii e siècle, n’a rien à voir avec la Méditerranée. On sait qu’il s’est constitué par insertion de contes dans un conte-cadre : un roi, qui a décou- vert l’infidélité de sa femme, décide de ne plus se marier et de prendre chaque nuit une concubine qu’il fait exécuter au matin. Shahrazâd, la fille de son vizir, se dévoue pour sauver les femmes et pique la curiosité du roi en lui racontant chaque nuit une histoire qui se poursuit d’une nuit sur l’autre, jusqu’à ce qu’au bout de la mille et unième nuit les préventions du roi contre les femmes se dis- sipent, et il épouse Shahrazâd. Les premières histoires ont été remplacées par d’autres au cours des siècles, et lorsque le recueil a été connu en Syrie et en Égypte (où au xii e siècle au moins il porte son nom définitif de Mille et Une Nuits ), on peut dire qu’il est entré dans l’espace méditerranéen. Le recueil va continuer d’évoluer, jusqu’à ce que peu après le milieu du xviii e siècle un cheikh égyptien, un homme de reli- gion, le fige, avec quelques ajouts de son cru, au point où il était arrivé. Son recueil a d’abord circulé sous la forme de volumineux manuscrits standard en 4 volumes, encore un peu malléables. Puis leur impression en 2 gros volumes sur les presses du pacha d’Égypte Méhémet Ali, à Bûlâq, dans ce qui était alors une banlieue du Caire, en 1835, a finalement établi une sorte de vulgate des Nuits dont les traductions modernes rendent compte aujourd’hui. Une analyse historique du texte arabe des contes, et les divers traits de civi- lisation qu’il véhicule, ce qu’on peut appeler ses « indices contextuels » (struc- tures des pouvoirs, états des agglomérations, habitats, termes vestimentaires, formes de piété), permettent de situer l’époque où les contes ont été com- posés, ce qui n’avait pas été envisagé jusqu’à aujourd’hui (Garcin, 2012). Il apparaît ainsi que plus de la moitié des contes du recueil ont été écrits entre le xvi e et le xviii e siècle, qu’il ne reste rien des contes primitifs du viii e siècle, et que les autres contes médiévaux ont été le plus souvent réécrits. Les Mille et Une Nuits que nous connaissons peuvent donc bien être considérées comme

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