Médias | El Oifi, Mohammed; Gebeil, Sophie

Médias 905 pratiques sont donc limitées à des groupes sociaux restreints et aux territoires disposant d’une connexion Internet. Réseau de réseaux sans centre, dans lequel l’espace public rejoint la conversation dans un système d’interrelations horizon- tales (Cardon, 2010), Internet permet des modes d’organisation inédits : décen- trés, non hiérarchisés, et auto-structurés. Cela coïncide avec l’individualisation croissante de l’engagement et des pratiques militantes (Galabov et Sayah, 2012). Média et moyen de communication spécifique, le Web est aussi au cœur d’un renouvellement des modes de mobilité en Méditerranée. Depuis les années 1990, l’émergence de Internet a été intégrée dans une réflexion plus large menée sur les relations entre le numérique et les migrations (Mattelart, 2009). Ces travaux ont mis en évidence la place croissante des tech- nologies numériques dans les pratiques diasporiques. Les outils de communi- cation du Web sont d’abord utilisés par les migrants pour pallier l’absence de la famille et des proches (Diminescu, 2005). Les courriels, les dispositifs de dis- cussions instantanées, les téléconférences et les réseaux sociaux sont des modes de communication réguliers, rapides et interactifs qui participent au renforce- ment des liens diasporiques. Ces relations constituent également un marché de « niche » qui se manifeste, sur le Web, par la multiplication des sites diaspo- riques et des médias de minorité. Cette « marchandisation de l’identitaire » est à l’origine de sites de plus en plus spécialisés qui participent à la segmentation de l’espace public (Rigoni, 2010). Les migrants sont ainsi insérés dans de nou- velles stratégies communautaires mises en réseau. Ainsi, avec la diffusion de l’Internet, le Web est devenu une source pré- cieuse pour l’étude des processus de médiation dans l’espace méditerranéen. Néanmoins, pour le chercheur en sciences humaines et sociales et particulière- ment pour l’historien, il est nécessaire de pouvoir conserver cette documentation de façon pérenne. La sauvegarde des données diffusées sur le Web est ainsi un enjeu pour la recherche mais aussi pour les sociétés dont elles émanent, dans la mesure où les traces du Web, aussi instables soient-elles, constituent désormais une composante de leur mémoire collective (Merzeau, 2006, p. 152). Depuis la création de l’association Internet Archive en 1996 par Brewster Kahle aux États-­ Unis, plusieurs pays ont mis en place des archives de Internet à l’image de la France qui dispose d’un dépôt légal duWeb depuis 2006. Cette nouvelle archive permet d’appréhender le Web comme source, mais cette initiative demeure une exception en Méditerranée. Les institutions d’archivage du Web se sont regrou- pées au sein d’un organisme de coopération : l’International Internet Preservation Consortium ( iipc ), mais rares sont les pays méditerranéens hors de l’Union européenne à en être membres. En incluant le Proche-Orient et le golfe Arabo- Persique, seuls l’Égypte et Israël sont impliqués dans l’ iipc . De surcroît, cette participation demeure relative puisque la Bibliotheca Alexandrina, en accord

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