Médecine | Buzzi, Serena; Ferracci, Elsa

Médecine 895 comme l’amnésie ou la mélancolie, jugées cependant plus faciles à guérir. Avicenne divise son art en deux parties, la médecine théorique et médecine pratique, laquelle se subdivise encore en médecine curative et médecine préventive. À l’autre extrémité de la Méditerranée, le Maghreb et l’Espagne, où se mélangent musulmans et arabo-berbères, connaissent la même prospérité suivie des mêmes troubles. Abû al-Qâsim ibn ‘Abbâs al-Zahrâwî, dit Abulcasis (936‑1013), s’im- pose pour l’époque comme un excellent chirurgien. Son œuvre en trente volumes intitulée Al-Tasrif s’inspire de Paul d’Égine, mais innove dans de nombreux domaines : elle montre notamment qu’il n’existe aucune frontière entre la méde- cine et la chirurgie, car le bon chirurgien doit connaître l’une et l’autre. L’une de ses grandes contributions, s’inspirant des principes d’Aristote, concernait l’étio- logie. À côté de cette épopée orientale, l’Europe occidentale privilégie la méde- cine théorique à la pratique. Abû al-Walîd Muhammad ibn Ahmâd ibn Rushd, dit Averroès (1126‑1198), qui vit entre Cordoue et Marrakech, se distingue en urologie, en neurologie et aussi en ophtalmologie, en décelant le rôle de la rétine. De grands échanges culturels se font en Espagne pendant les cinq siècles de la Reconquista. L’Andalousie, prospère, attire les commerçants, les visiteurs, les moines chrétiens et les clercs. Soucieux que leurs successeurs profitent de leurs connaissances et de leurs voyages, les savants traduisent en latin les vieux livres grecs, dont ils reçoivent le texte en arabe. Cette transmission du savoir antique se fait donc à travers plusieurs langues : grec, syriaque, puis arabe, hébreu et enfin latin. Ces échanges se multiplient sur une période d’environ 400 ans. Il en résulte que, grâce aux Arabes, l’Occident chrétien connaît les auteurs grecs anciens, aussi bien Platon et Aristote qu’Hippocrate et Galien. Pendant plusieurs siècles, sous les régimes lombard, normand et souabe, l’Italie du Sud et la Sicile deviennent le bouillonnant lieu de passage de la culture grecque à la culture latine, par l’intermédiaire de l’arabe, au même titre que Cordoue, Séville ou Tolède. Les premières écoles médicales naissent sur les rives de la Méditerranée à Salerne, puis à Montpellier. Des savants de toute l’Europe chrétienne et de l’Espagne juive et musulmane viennent s’ins- truire à l’école de Salerne. Constantin l’Africain (1020‑1087) est considéré comme le plus célèbre traducteur de l’arabe en latin. Un ouvrage issu de cette école se per- pétue jusqu’à nos jours : il s’agit du Régime de santé . Ce recueil de règles de bonne santé traite de l’alimentation, du mode de vie, de l’activité sexuelle, conseillant la modération dans tous les domaines ; il inspirera des centaines d’ouvrages de vulga- risation traduits dans toutes les langues. La place tenue par les femmes dans le corps enseignant suscite une controverse légendaire : à côté de Trotula ou Trota, à qui l’on doit un traité de gynécologie et d’obstétrique, auraient siégé d’autres femmes, dont la tradition conserve les noms (par exemple, Hildegard von Bingen). Les inquiétudes qui se manifestent à la fin du xii e siècle parmi les clercs et les puissants semblent avoir provoqué les éclatements de l’Europe dans

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